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Industrie du cinéma à Montréal et tournages mettant Montréal en vedette


loulou123

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MONTRÉAL FAIT SON CINÉMA (1/6)

Les charmes d’une ville bombardée, par la cinéaste Léa Pool

11 juillet 2017 | André Lavoie - Collaborateur | Cinéma
Rien ne fait plus plaisir à Léa Pool que les commentaires de spectateurs montréalais qui affirment redécouvrir leur ville à travers ses films.Photo: Jacques Nadeau Le DevoirRien ne fait plus plaisir à Léa Pool que les commentaires de spectateurs montréalais qui affirment redécouvrir leur ville à travers ses films.

Paysage incontournable du cinéma québécois, décor interchangeable pour les cinéastes américains, Montréal constitue un vaste plateau de tournage aux possibilités infinies. Les artisans de l’industrie connaissent bien les beautés et les vices cachés d’une métropole désireuse de tirer son épingle du jeu sur le grand échiquier du cinéma international. Tout au long de l’été, dans Le Devoir, certains d’entre eux évoquent cette ville sous le prisme de leur profession. Aujourd’hui, la cinéaste Léa Pool, qui n’a pas craint de mélanger les lieux pour offrir une nouvelle vision de sa terre d’adoption.

 

Originaire de Soglio en Suisse, établie à Montréal depuis 1975, Léa Pool a tout de suite aimé cette ville, mais pas pour des raisons esthétiques. « Honnêtement, je la trouvais assez moche », lance-t-elle sans gêne sur la terrasse d’un café de la rue Hutchison, à deux pas de chez elle, un coin de la métropole qu’elle n’a jamais quitté depuis son arrivée au Québec.

 

Ses constats de l’époque, plusieurs les partageaient déjà. « Il n’y avait pas de concept architectural, et même si Montréal est une île, on ne le sentait pas du tout parce qu’on n’avait pas accès au fleuve, ce qui lui donnait l’aspect d’un lieu isolé. Ce qui m’a plu, ce sont les gens, et un grand sentiment de liberté. »

 

Montréal, ville bombardée

 

Au début des années 1980, ses premiers films reflètent cette impression tenace de ville bigarrée, insaisissable. Ces failles deviendront les traits distinctifs d’une oeuvre singulière, portant un regard européen sur un territoire nord-américain marqué par la désindustrialisation, et une certaine pauvreté. « Je voyais Montréal comme une ville bombardée, et ça me fascinait », confesse Léa Pool.

image.jpgPhoto: Pedro Ruiz Le Devoir
 

Cette vision se matérialise dès son premier long métrage, Strass Café (1980), un film-essai aux accents durassiens, traitant — bien sûr ! — d’incommunicabilité. « On y voyait une ville à l’abandon, pleine d’immeubles abandonnés aux fenêtres cassées, de l’herbe qui pousse sur les rails de chemin de fer, et des usines désaffectées le long du canal de Lachine ; ça me faisait penser à une ville d’Europe de l’Est. Évidemment, c’est ce que j’ai voulu voir, car c’est un travail de création et de représentation. » Avec les années, son approche deviendra un peu plus léchée.

 

Sa filiation avec Marguerite Duras se confirmera dans La femme de l’hôtel (1984), révélant aussi sa propension « à mélanger les lieux », une leçon apprise chez Patrice Chéreau (« Dans L’homme blessé [1983], il utilise plusieurs gares pour en faire une seule. ») et Alain Tanner (« Il mélangeait souvent Genève et Lausanne, les spectateurs d’ici ne remarquaient rien. »). Comme elle ne trouvait pas à Montréal son hôtel idéal pour cette méditation sur la création mettant en vedette Paule Baillargeon, Louise Marleau et Marthe Turgeon, elle jette son dévolu sur le Clarendon… à Québec. « Ce n’était pas de la provocation, mais un choix volontaire : pour certains, ça ne posait pas problème, mais pour d’autres, c’était surprenant. »Ce qui prouvait à son avis « que le cinéma québécois était encore très ancré dans le documentaire, même dans la fiction ».

 

Regard nouveau sur des paysages familiers

 

Rien ne fait plus plaisir à Léa Pool que les commentaires de spectateurs montréalais qui affirment redécouvrir leur ville à travers ses films. « J’ai souvent entendu : “Ça prenait ben quelqu’un qui vient de la Suisse pour montrer Montréal de cette façon !”Ça confirme que j’ai un regard… qui est le mien et pas celui des autres. Dans notre métier, on a toujours un petit sentiment d’usurpation. »

 

Sa plus grande lettre d’amour à Montréal s’appelle toujours À corps perdu (1988), une libre adaptation d’un roman d’Yves Navarre, Kurwenal, transposée en sol québécois. Là encore, avec ses chantiers placardés et ses façades en décrépitude, il émanait de ce portrait de la ville un charme mélancolique, grâce aux images de Pierre Mignot et aux musiques envoûtantes du compositeur argentin Osvaldo Montes. « Le personnage du photographe transporte mon propre regard sur Montréal, et dévoile son âme profonde. »

 

À l’occasion des fêtes du 350e anniversaire, Léa Pool a participé au film à sketchesMontréal vu par… (1991). Dans Rispondetemi, la course folle en ambulance d’une Anne Dorval ensanglantée devient prétexte à un changement de regard. « Je voulais montrer une cité de verre et de béton, avec au centre ce personnage entre la vie et la mort. » Elle admet qu’un Montréal « bombardé » aurait paru étrange dans le cadre d’un hommage !

 

Alors qu’elle s’apprête à lancer en septembre Et au pire, on se mariera, tourné dans Hochelaga-Maisonneuve, Léa Pool trouve Montréal facile à aimer, mais pas toujours facile à filmer. « Le coût des locations a beaucoup augmenté à cause des productions américaines. Pour chaque déplacement, ça devient de plus en plus difficile. » Cela lui donne-t-il envie de tourner ailleurs ? « J’ai passé plus d’un mois à Berne pour la postproduction de mon dernier film, une ville magnifique protégée par l’UNESCO. A-t-elle plus d’âme que Montréal ? Non. »

image.jpgQuels sont les films qui, selon vous, représentent le mieux Montréal ? 

Deux titres me viennent tout de suite à l’esprit : Un zoo la nuit (1987, photo), de Jean-Claude Lauzon, et Jésus de Montréal (1989), de Denys Arcand. Ils sont très différents, mais Montréal est représentée de façon créative et personnelle. Qui a su filmer le mont Royal aussi bien qu’Arcand ? Pas grand monde… D’ailleurs, je devais jouer dans le film aux côtés du cinéaste Georges Dufaux dans la scène au métro Place-Saint-Henri, mais je n’étais pas bien du tout ce soir-là, et finalement on ne voit que Georges. Lui et moi devions former un couple d’Europe de l’Est : Denys nous voyait comme ça !

La plus belle image de Montréal tirée d’un de vos films ? 

Dans À corps perdu, lorsque le photographe, Kurwenal [Matthias Habich], monte dans la nacelle avec Quentin [Jean-François Pichette] : je ne sais pas si c’est vraiment Montréal, mais on a une belle impression de hauteur, et de liberté. J’ajouterais aussi le panoramique du centre-ville au début de La femme de l’hôtel, avec la voix de Paule Baillargeon.

 

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http://www.ledevoir.com/culture/cinema/503615/la-ville-vue-de-la-cote-de-liesse

MONTRÉAL FAIT SON CINÉMA (2/6)

La ville vue de Côte-de-Liesse

18 juillet 2017 | André Lavoie - Collaborateur | Cinéma
Dès la fin des années 1950, « Montréal devient non seulement un lieu de tournage, mais une présence forte, un personnage en soi », souligne Marc St-Pierre.Photo: Pedro Ruiz Le DevoirDès la fin des années 1950, « Montréal devient non seulement un lieu de tournage, mais une présence forte, un personnage en soi », souligne Marc St-Pierre.

Paysage incontournable du cinéma québécois, décor interchangeable pour les cinéastes américains, Montréal constitue un vaste plateau de tournage aux possibilités infinies. Les artisans de l’industrie connaissent bien les beautés et les vices cachés d’une métropole désireuse de tirer son épingle du jeu sur le grand échiquier du cinéma international. Tout au long de l’été, dans Le Devoir, certains d’entre eux évoquent cette ville sous le prisme de leur profession. Aujourd’hui, Marc St-Pierre, conservateur de collections à l’Office national du film du Canada (ONF), revendiquant plus de 7000 films visionnés derrière la rétine.

 

Il a suffi d’un déménagement pour que Montréal existe enfin devant la caméra de ses cinéastes. Car avant de prendre ses quartiers sur le chemin de la Côte-de-Liesse, à Saint-Laurent, en 1956, l’ONF, institution fédérale et bilingue fondée en 1939 et installée à Ottawa, ignorait la métropole.

 

« Cela a tout changé », affirme Marc St-Pierre, lui qui possède une vaste vue d’ensemble sur la production abondante et diversifiée (environ 5000 films, seulement pour la collection française) de cet organisme dont le mandat demeure toujours de « faire connaître et comprendre le Canada aux Canadiens et aux autres nations ».

 

Dans les années 1940, Montréal n’avait pas encore perdu son statut de métropole économique, mais affichait des allures de ville de province… et de royaume du vice ! Or, l’ONF n’explore pas toutes ces facettes. Marc St-Pierre évoque La cité de Notre-Dame(1942), de Vincent Paquette, une bizarrerie. « Ce fut tourné par un cinéaste francophone d’Ottawa, et avec une équipe entièrement francophone, une première, pour souligner le 300e anniversaire de Montréal. On voit l’aéroport de Dorval, les tramways, le mont Royal, et l’accent est mis sur les cérémonies religieuses : ça semble vraiment plate ! » Derrière cette façade grouillaient les cabarets, et les bordels, mais le film ne s’y attarde pas, tout comme le bucolique Au parc Lafontaine (1947), de Pierre Petel, « un classique », et surtout « un lieu méconnaissable par rapport à aujourd’hui ».

 

Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, les cinéastes de l’ONF sont finalement devenus des témoins actifs des transformations de Montréal. La naissance du cinéma direct y est pour beaucoup, faisant éclater le carcan du documentaire pour aller — enfin ! — dans les rues, les usines, les tavernes, les marchés, les clubs de boxe, recueillir une parole que l’on n’avait jamais entendue.

 

Montréal en noir et blanc, et en beauté

 

Dès la fin des années 1950, coïncidant avec les débuts du cinéma direct, « Montréal devient non seulement un lieu de tournage, mais une présence forte, un personnage en soi », souligne Marc St-Pierre. « Les préoccupations des cinéastes ne sont pas tout à fait esthétiques, mais l’esthétique de ces films est extraordinaire, et le noir et blanc y est éclatant. » Il suffit de voir l’hommage signé Luc Bourdon à partir des archives de cette époque, La mémoire des anges (2008), pour le découvrir.

 

Sur cette période, le conservateur est intarissable. Certains films font figure d’incontournables (Golden Gloves [1961], de Gilles Groulx, le film collectif À Saint-Henri le 5 septembre [1962], d’Hubert Aquin, La vie heureuse de Léopold Z [1965], de Gilles Carle), mais selon le diplômé en cinéma et en philosophie, la liste est plus longue. Au bout de ma rue (1958), de Louis-Georges Carrier, présente un Montréal à hauteur d’enfant « découvrant un univers qui va au-delà de son quartier, le Centre-Sud, magnifiquement filmé par Michel Brault », ou encore Dimanche d’Amérique (1961), de Gilles Carle, tourné dans la Petite-Italie, « qui nous transporte dans un Montréal qui n’existe plus ».

 

Le saccage des quartiers de la métropole fut une grande préoccupation pour certains cinéastes, dont Michel Régnier (Griffintown, 1972) et Maurice Bulbulian (La P’tite Bourgogne, 1968), se plaçant résolument aux côtés des citoyens lésés. Revoir ces films après des décennies de développement immobilier parfois anarchique, c’est constater l’étendue des transformations, et pas seulement sur les paysages urbains.

 

À la première personne

 

Au fil de ses découvertes, Marc St-Pierre remarque à quel point Montréal s’est peu à peu effacée dans les films de l’ONF à partir des années 1980, période où dominaient « les têtes parlantes ». Par la suite, on assiste à l’émergence d’un cinéma où le « Je » domine, et où la ville devient prétexte à des pérégrinations nostalgiques, ou mélancoliques.

 

Cette tristesse imprègne des films comme Tu as crié LET ME GO (1996), d’Anne Claire Poirier, « un Montréal un peu glauque, presque sordide »; Comme une odeur de menthe (2002), de Pierre Sidaoui, « le regard d’un immigrant d’origine libanaise qui ratisse Montréal en se rappelant Beyrouth »; et plus récemment, D’où je viens (2013), de Claude Demers, la vision d’un p’tit gars de Verdun se réconciliant à la fois avec ce coin de la ville et son enfance.

 

Bref, autant de films pour faire redécouvrir Montréal aux Montréalais, et pourquoi pas, à toutes les nations…

Quels sont les films qui représentent le mieux Montréal ?image.jpgJe dois d’abord mentionner Le Matou (1985), de Jean Beaudin, parce que c’est le tout premier film québécois que j’ai vu, et qui m’a fait découvrir Montréal, ma ville, pour la première fois au cinéma. Je sais aussi que d’autres l’ont mentionné, mais je ne peux pas résister à Jésus de Montréal (1989), de Denys Arcand : la scène de la crucifixion sur le mont Royal me donne encore la chair de poule. Et finalement, celui-ci n’est pas vraiment un film sur Montréal, mais sur un événement qui se déroule à Montréal : Les Jeux de la XXIe olympiade (1978), de Jean Beaudin, Marcel Carrière, Georges Dufaux et Jean-Claude Labrecque. J’avais 10 ans à l’époque des Jeux, je croyais n’en avoir gardé aucun souvenir, et en voyant ce film, il n’y a pas si longtemps, tout m’est revenu en mémoire, comme une réminiscence proustienne !
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Léa Pool a aussi dit ceci: 

« Il n’y avait pas de concept architectural, et même si Montréal est une île, on ne le sentait pas du tout parce qu’on n’avait pas accès au fleuve, ce qui lui donnait l’aspect d’un lieu isolé. Ce qui m’a plu, ce sont les gens, et un grand sentiment de liberté. »

Cela a pris des décennies, mais on dirait que Montréal commence à peine à  reconnecter avec son fleuve...

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Oui, dans les années 70-80 Montréal n'avait pas la même tronche qu'aujourd'hui, c'est sur. Et on peut facilement imaginer l'impact que le Montréal des années 70 a pu avoir sur une personne qui arrive de la Suisse ou les villes sont belles, propres, léchées à souhaits et avec une architecture beaucoup plus riche et ancienne que la notre. Mais malgré tout, Léa Pool a quand même trouvé son compte....avec les gens !  On en revient toujours à cela avec Montréal ou ce sont plutôt les gens que le bâti qui attirent l'attention et qui, avec le temps, ont forgés l'identité indéniablement distincte et forte que possède Montréal, surtout dans un contexte nord américain.

En passant, très intéressant ces articles dans Le Devoir !

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Et pourtant, à la fin des années 80, on disait que Montréal était dans une véritable renaissance! Il y avait beaucoup plus de construction de tours à bureau qu'aujourd'hui (3-4 par années!) et le développement économique commercial était beaucoup plus fort. On refaisait des secteurs entier de la ville (Vieux-port, avenue McGill College, Petite Bourgogne, Parc des Iles..) Là c'est juste le résidentiel qui va bien. Le commercial est au point mort. Alors, oui les tourettes en verre et alu sont belles, mais ça rien à voir avec l'effervescence d'il y a 30 ans.

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Il y a 9 heures, Rocco a dit :

Et pourtant, à la fin des années 80, on disait que Montréal était dans une véritable renaissance! Il y avait beaucoup plus de construction de tours à bureau qu'aujourd'hui (3-4 par années!) et le développement économique commercial était beaucoup plus fort. On refaisait des secteurs entier de la ville (Vieux-port, avenue McGill College, Petite Bourgogne, Parc des Iles..) Là c'est juste le résidentiel qui va bien. Le commercial est au point mort. Alors, oui les tourettes en verre et alu sont belles, mais ça rien à voir avec l'effervescence d'il y a 30 ans.

Le taux de chômage actuel est plus bas, les industries qui font rouler la ville sont bien plus modernes (high tech, comm, pharma, santé, aéro, etc.) et prometteuse pour l'avenir. Des tonnes d'espaces à bureaux ont été remplis dans des quartiers comme Mile-End ou en banlieue, ce qui n'était pas le cas il y a 30 ans.

Tu dis n'importe quoi : l'effervescence actuelle du Mtl métropolitain est dure à battre. Même si le besoin d'espaces à bureaux n'est pas aussi spectaculaire qu'avant ou centré uniquement dans le cv.

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  • 2 semaines plus tard...

http://www.ledevoir.com/culture/cinema/504135/montreal-ville-ouverte-et-orange

Montréal fait son cinéma (3/6) – Montréal, ville ouverte… et orange

25 juillet 2017 | André Lavoie - Collaborateur | Cinéma
Peu importe la saison, Patricia Bergeron espère qu’un jour, les autorités municipales lui permettront de montrer la ville autrement.Photo: Annik MH de Carufel Le DevoirPeu importe la saison, Patricia Bergeron espère qu’un jour, les autorités municipales lui permettront de montrer la ville autrement.

Paysage incontournable du cinéma québécois, décor interchangeable pour les cinéastes américains, Montréal constitue un vaste plateau de tournage aux possibilités infinies. Les artisans de l’industrie connaissent bien les beautés et les vices cachés d’une métropole désireuse de tirer son épingle de jeu sur le grand échiquier du cinéma international. Tout au long de l’été dans Le Devoir, certains d’entre eux évoquent cette ville sous le prisme de leur profession. Aujourd’hui, Patricia Bergeron, directrice de production, qui ratisse Montréal de jour comme de nuit, pour l’amour du septième art.

 

Pendant ses études en cinéma à l’UQAM, Patricia Bergeron a surtout vu Montréal… en noir et blanc. Au début des années 1990, l’Office national du film du Canada (ONF) avait pignon sur rue dans le Quartier latin alors que la CinéRobothèque rendait accessible une partie de sa collection. Celle qui n’avait jamais imaginé se retrouver du côté de la production (« Ce n’est pas un métier qui s’apprend sur les bancs d’école. ») a visionné tellement de films de l’ONF du temps de sa glorieuse époque « [qu’elle ne voyait] plus du tout le Montréal d’aujourd’hui ».

 

Elle y travailla pendant un certain nombre d’années, pour ensuite s’engager dans une autre phase de sa carrière, cette fois à titre de directrice de production auprès de cinéastes indépendants qui ont une haute exigence de leur métier, mais doivent souvent faire des miracles avec des bouts de ficelles.

 

Oser Montréal autrement

 

Cette Montréalaise pur béton a longtemps eu la bougeotte, mais dans le même (grand) carré de sable : Quartier latin, Plateau-Mont-Royal, Mile-End. « J’ai commencé à voir Montréal autrement quand j’ai déménagé à Pointe-Saint-Charles, il y a 11 ans. C’est un coin que je connaissais surtout à travers les films de l’ONF, dont ceux de Maurice Bulbulian, mais qui est encore trop peu vu au cinéma. On tourne beaucoup dans les mêmes quartiers, dont le Plateau et le Mile-End, où on a décrété un moratoire pendant un certain temps : les citoyens sont parfois exaspérés… mais nous aussi, comme spectateurs. »

 

Son travail de conciliation entre les rêves des cinéastes et les conditions matérielles pour les réaliser l’amène à ratisser la ville de long en large : une tâche, oui, mais jamais une corvée. « Pour trouver la bonne location, il faut la chercher. Après, c’est un compromis entre l’espace, la lumière, l’horaire… et la couleur du mur ! Chaque membre de l’équipe doit lâcher quelque chose pour arriver à un bon résultat. C’est pour ça que je n’aime pas tourner en studio, car ce n’est pas le réel, et on l’oublie vite. »

 

Au fil des productions, le réel, Patricia Bergeron l’a trouvé aux quatre coins de la ville, comme à Montréal-Nord pour Simon Galiero dans La mise à l’aveugle (2012), confessant qu’elle n’était « jamais allée aussi loin » dans sa propre ville. Mis à part le défi de dénicher 30 lieux pour un tournage de 27 jours, c’est de l’hospitalité des gens qu’elle se souvient. « À cause d’un changement d’horaire, il a fallu trouver un dépanneur en cinq minutes. Nous avons visité celui qui était situé le plus près, le propriétaire a accepté, et la scène fut bouclée rapidement. » De cette expérience, elle tire un constat positif : « Certains arrondissements ne sont pas encore tannés de voir des équipes de tournage, et les gens sont fiers de leur commerce, de leur maison. La magie du cinéma opère encore. »

 

Un beau zoo la nuit

 

Cette magie lui apparaît plus facile à recréer lorsque la nuit tombe sur Montréal, surtout en hiver. « Travailler à -20 en janvier plutôt qu’à 40 en juillet, ça change tout : plus de temps pour tourner, et des accès plus simples. En été, Montréal est occupée, et les gens affichent vite leur ras-le-bol. » Et celui du 375e, comme beaucoup de gens dans l’industrie, elle va s’en souvenir longtemps. « Je traversais le pont Jacques-Cartier avec une équipe de tournage, et on ne voyait que de l’orange ! Des cônes partout le long de René-Lévesque ! Le Bureau du cinéma et de la télévision a sûrement mal à la tête, mais nous aussi ! » Car festivités, rues bloquées, tournages, et travaux d’aqueduc ou d’asphaltage ne font pas bon ménage…

 

Alors, vivement les charmes sombres de l’hiver, comme dans Montréal la blanche (2016), de Bachir Bensaddek, où il fallait recréer l’ambiance des Fêtes pendant un tournage débutant en janvier, alors que trois jours avant le premier coup de claquette il n’y avait pas eu un seul flocon de neige. « Il y avait beaucoup de scènes nocturnes en taxi, et on devait voir des lumières de Noël. On a réussi à convaincre l’Association des marchands de la rue Saint-Hubert de laisser les leurs jusqu’à la mi-février, question d’assurer la continuité. » Et c’est avec une émotion non dissimulée que la directrice de production évoque ces nuits de tempête avec Alexandre Landry dans L’amour au temps de la guerre civile (2014), de Rodrigue Jean. « Je revois certaines scènes, j’en ai des frissons… et pas seulement parce qu’on a eu froid ! »

 

Peu importe la saison, Patricia Bergeron espère qu’un jour, les autorités municipales lui permettront de montrer la ville autrement (« Le port, le bord de l’eau, le métro, c’est inaccessible, ou hors de prix, surtout pour le cinéma québécois. »). Et après cet été de tous les excès, elle ne formule qu’un souhait : « Que Montréal se repose un peu. »

 
Quel est le film qui représente le mieux Montréal?« Quand j’ai vu Eldorado(1995), de Charles Binamé, au moment de sa sortie, j’ai découvert, pour la première fois, que Montréal pouvait être un personnage. J’avais aussi l’impression que l’on montrait ma vie, car l’âge des personnages correspondait au mien, et ils fréquentaient des lieux que je connaissais, dont les Foufounes électriques ; étudiante à l’UQAM en cinéma, je tournais aussi des films là ! Lorsque je marche sur l’avenue du Mont-Royal près de la rue Saint-Dominique, là où est situé l’immeuble qu’habitait Pascale Montpetit dans Le coeur au poing(1998), le deuxième film de sa trilogie, j’y repense immédiatement. »
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On 19/7/2017 at 9:32 AM, MtlMan said:

Le taux de chômage actuel est plus bas, les industries qui font rouler la ville sont bien plus modernes (high tech, comm, pharma, santé, aéro, etc.) et prometteuse pour l'avenir. Des tonnes d'espaces à bureaux ont été remplis dans des quartiers comme Mile-End ou en banlieue, ce qui n'était pas le cas il y a 30 ans.

Tu dis n'importe quoi : l'effervescence actuelle du Mtl métropolitain est dure à battre. Même si le besoin d'espaces à bureaux n'est pas aussi spectaculaire qu'avant ou centré uniquement dans le cv.

Le commercial et les bureaux prend une débarque et ce n'est pas seulement Montreal. On a rien vu encore l'informatique et internet change beaucoup de chose. Moins d'espace de bureau nécessaire moins d'employés etc... A Paris beaucoup d'espace a bureau a été reconverti en logement. 

http://immobilier.lefigaro.fr/article/voici-comment-des-bureaux-ont-ete-reconvertis-en-logements-a-paris_8916cf66-51db-11e7-9aa8-d9123e1e563e/

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On 19/7/2017 at 0:16 AM, steve_36 said:

Oui, dans les années 70-80 Montréal n'avait pas la même tronche qu'aujourd'hui, c'est sur. Et on peut facilement imaginer l'impact que le Montréal des années 70 a pu avoir sur une personne qui arrive de la Suisse ou les villes sont belles, propres, léchées à souhaits et avec une architecture beaucoup plus riche et ancienne que la notre. Mais malgré tout, Léa Pool a quand même trouvé son compte....avec les gens !  On en revient toujours à cela avec Montréal ou ce sont plutôt les gens que le bâti qui attirent l'attention et qui, avec le temps, ont forgés l'identité indéniablement distincte et forte que possède Montréal, surtout dans un contexte nord américain.

En passant, très intéressant ces articles dans Le Devoir !

J'aime bien le film un Zoo la nuit ca montre un dark side de Montreal.

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