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Publié le 26 février 2009 à 07h32 | Mis à jour le 26 février 2009 à 07h33

 

Un trou... et de gros doutes

 

Vincent Marissal

La Presse

Personne ne s'attendait à un mea-culpa à la japonaise, avec un dirigeant en pleurs, mimant un hara-kiri devant les journalistes, mais peut-être qu'un petit «on est désolé, on a foiré» aurait adouci les pertes abyssales de 40 milliards de la Caisse de dépôt.

 

Bien sûr, même une séance collective d'autoflagellation des membres de la haute direction de la Caisse n'aurait pas fait réapparaître les milliards perdus. De les entendre nous expliquer avec froideur que l'épisode des PCAA est «regrettable» ne suffira toutefois pas à dissiper la grogne des contribuables.

 

Le plus surréaliste était de voir les contorsions des dirigeants de la Caisse pour expliquer que, n'eût été cette «regrettable erreur» des PCAA, le rendement de l'institution serait tout à fait honorable.

 

C'est un peu comme si votre chirurgien vous annonçait en salle de réveil: «Nous avons retiré un de vos poumons par erreur, vous avez perdu 25% de votre sang et vous récupérerez peut-être vos moyens d'ici sept ans, mais n'eût été cette regrettable situation, vous seriez en excellente santé.»

 

N'attendez pas d'excuses, ou même un timide mea-culpa, du gouvernement Charest non plus. Celui-ci dit ne pas avoir été mis au courant. Les gestionnaires de la Caisse, eux, blâment la crise financière. Nous sommes donc ici confrontés à un «act of god», dans le jargon des compagnies d'assurances. Une fatalité imprévisible, comme un tsunami ou un éclair qui s'abat sur le parapluie du badaud malchanceux.

 

On pourrait évidemment montrer du doigt l'ancien président, Henri-Paul Rousseau ou son successeur, Richard Guay, mais ils sont tous les deux partis de la Caisse. Quant au président actuel, Fernand Perreault, il n'est là qu'à titre intérimaire et il sera remplacé très prochainement, selon la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget.

 

Il ne s'agit pas, évidemment, de se lancer dans une chasse aux coupables et de mettre leur tête sur des pieux à l'entrée de la cité pour calmer le peuple. Cela dit, c'est beaucoup demander aux Québécois d'accepter que personne n'est responsable pour la perte de 40 milliards de dollars.

 

La commission parlementaire confirmée hier par Mme Jérôme-Forget donnera-t-elle des réponses plus satisfaisantes que ce que nous avons entendu hier?

 

Elle permettra au moins d'entendre Henri-Paul Rousseau et de comparer ses explications avec son exposé rassurant (sur les PCAA, en particulier) de l'an dernier.

 

De toute façon, le mal est fait. Au point où on en est, le plus urgent est de s'assurer, en revoyant le mandat et le fonctionnement de la Caisse et ses relations avec le gouvernement, qu'une telle débâcle ne se reproduise.

 

À partir de maintenant, le débat se transporte sur le terrain politique et l'opposition ne manquera pas une si belle occasion d'accabler le gouvernement Charest. Cette contre-performance historique de la CDP, Jean Charest risque de la traîner comme un boulet jusqu'à la fin de son mandat (ou jusqu'à ce qu'il parte, ce qui pourrait survenir avant la fin de son mandat, en 2012).

 

Jean Charest se défendra, bien sûr, en affirmant que la Caisse est indépendante, que son gouvernement n'est pas intervenu dans ses décisions et qu'il entend mettre en place des mécanismes de transparence. La politique ne s'embarrasse pas de tant de nuances, surtout pas devant un trou de 40 milliards.

 

Pour le gouvernement, c'est une situation perdante-perdante, comme disent les anglos: si le gouvernement se mêle des affaires de la Caisse, on le tiendra directement responsable de ses déboires; s'il s'en tient loin, on dira qu'il aurait dû mieux l'encadrer.

 

Et lorsqu'une institution publique comme la Caisse perd 40 milliards, le premier réflexe d'une majorité de Québécois est de se dire qu'il est impossible que le gouvernement n'ait pas été mis au courant.

 

Difficile, en effet, de croire que le gouvernement n'avait pas, ne serait-ce qu'une idée générale, de ce qui s'en venait. On ne le saura jamais avec certitude, mais le fil des événements de l'automne dernier, retracé hier par la haute direction de la CDQ, fait apparaître des coïncidences étonnantes.

 

Début septembre, tout baigne à la Caisse, qui se dirige vers une modeste croissance. Mi-septembre, premier signal d'alarme avec la faillite de la banque d'investissement Lehman Brothers. À partir de là, c'est la débandade sur les marchés. Un mois plus tard, mi-octobre, la direction de la Caisse réalise qu'elle se dirige maintenant vers des pertes records.

 

En septembre, nous étions en pleine campagne électorale fédérale et personne à Québec ne parlait d'élections québécoises avant la fin de 2008. Ce scénario avait même été exclu par Jean Charest quelques semaines plus tôt. Ses conseillers n'étaient pas en mode élection, ses députés non plus.

 

Subitement, à la mi-octobre, les choses se précipitent. Selon des sources libérales fiables, Jean Charest a donné le «go» vers le 20 octobre, juste après le Sommet de la francophonie à Québec.

 

A-t-il été inspiré seulement par les chiffres des sondages ou ceux de la Caisse ont-ils aussi influencé sa décision? Ça non plus, on ne le saura jamais, mais posons la question autrement: dans quelle situation se trouverait Jean Charest aujourd'hui, avec ce désastre sur les bras, s'il était encore minoritaire à l'Assemblée nationale?

 

Ajoutez à cela le retour des déficits, pourtant exclus avec conviction par les libéraux pendant la campagne, et vous avez là tous les ingrédients pour une rentrée parlementaire explosive, dans deux semaines.

 

Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca

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Membres prolifiques

Le Responsable

 

Devant les déboires sans précédents de la Caisse de dépôt et placement et considérant les pertes scandaleuses que les contribuables auront à rembourser, il est naturel que le gouvernement cherche à se dérober. Par contre, que les libéraux de Jean Charest aient délibérément cherché à tromper les citoyens lors de la dernière campagne électorale, alors qu'ils connaissaient parfaitement le bilan financier de la Caisse, cela est tout à fait inexcusable et le gouvernement doit reconnaître son mensonge.

 

Quant aux gestionnaires de la Caisse, jusqu'à quel point peut-on les blâmer des déboires financiers de leur institution? Sont-ils moins bien formés, moins compétents, moins bien renseignés, ou alors moins honnêtes que leurs homologues du reste du Canada? Peut-on prétendre que ce sont des gestionnaires moins prudents que ceux du reste du pays? La seule explication logique tient au fait qu'ils ont plutôt cherché à respecter les intentions du législateur.

 

Comme le rappelle le chroniqueur Michel C. Auger, on ne parle pas de vagues souhaits exprimés par un gouvernement, par son premier ministre ou par sa ministre des Finances; on parle d'une loi déposée par le gouvernement libéral et approuvée (sous le bâillon) par l'Assemblée nationale en 2004. Cette loi stipule clairement que la CDP doit d'abord viser le rendement financier des avoirs qui lui sont confiés. Les gestionnaires de la Caisse devaient-ils ignorer la loi et gérer leur portefeuille à leur guise en suivant seulement les règles de l'art, comme le font les autres grands gestionnaires de fonds publics ailleurs au Canada? Le gouvernement va-t-il abolir cette loi inutile et pernicieuse, ou recommander dorénavant aux gestionnaires de... l'ignorer? Il y a sans doute eu «erreur», une erreur extrêmement grave, mais c'est le gouvernement qui en est le premier responsable.

 

Normand Asselin, Gatineau, le 26 février 2009

 

Le Devoir édition du mardi 03 mars 2009

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Les gestionnaires ne sont pas à blâmer, ils se sont exposés à des risques dans le cadre de ce que leur mandat le permettait. Quant à savoir si le mandat de la caisse était vraiment celui que la société voulait, c'est facile à dire après que les risques n'ont pas tourné en faveur de la caisse. Personne ne se plaignait lorsque les rendements de la caisse étaient supérieurs à ses compétiteurs, pourtant un rendement plus élevé sans risque n'est rien d'autre qu'une anomalie.

 

De plus, il faut voir que la caisse va continuer ses opérations et que son rendement moyen va probablement nettement s'améliorer d'ici 2/3 ans. La pire stratégie serait de changer de stratégie maintenant et de diminuer son potentiel de gain après s'être exposé à des pertes élevées!!

 

Je ne suis pas d'accord avec le ton moralisateur du devoir, il n'y a pas de "coupable" dans cette affaire.

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Malek et GregBx:

 

En fait, c'est faux ce que vous dites, ça fait des années que Mario Dumont et Québec Solidaire se plaignent de la Caisse et de son mandat beaucoup trop risqué.

Jean Charest a toujours évité la question. il est un des principaux responsables selon moi.

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Je ne suis pas d'accord avec le ton moralisateur du devoir, il n'y a pas de "coupable" dans cette affaire.

 

Étienne a posté une lettre du courrier des lecteurs probablement car il s'agit d'un Normand Asselin de Gatineau qui a écrit le texte. Ça ne représente en rien le point de vue du Devoir, quoique j'ai l'impression que ça représente le point de vue de Étienne à travers quelqu'un d'autre.

 

De là à accuser Jean Charest des problèmes de la Caisse, faut le faire! C'est-tu lui qui gère ça? Non. (En passant, je déteste Charest) C'est comme un garçon de 15 ans qui vole au dépanneur pis on accuse son père. Oui, le père l'a probablement mal élevé, mais c'est pas lui qui a commis le vol, quand même!

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Rocco, pour suivre ton exemple, Je le trouve un peu plus léger. Modifions le.

Pendant des années le père, ( Charest) laissait son fils ramener plein d'argent à la maison.

Pendant ce temps, les autres enfants du quartier, beaucoup plus sages et conservateurs, en ramenaient beaucoup moins.

 

Les orientateurs scolaires trouvaient qu'il était louche que Charest fils rapporte autant d'argent alors que ses confrères, pourtant aussi intelligents, en fassent moins.

 

Aveuglé par la fierté et la notoriété que cela lui procurait ( il avait créé un génie!!), Charest père n'écoutait aucunement les conseils des orientateurs scolaires.

-À quoi bon modifier une formule gagnante??

-Car nous croyons que votre fils met sa vie en danger pour ramener tout cet argent!!!

 

Puis un beau jour, Charest fils est revenu en ambulance à la maison. Il était très mal en point, tellement qu'on doutait pour sa vie.

 

Même si les rumeurs circulaient depuis plusieurs mois que Charest fils était très mal en point, le père niait en bloc.

 

Puis, lorsque tout le monde apprit la triste nouvelle, et que le père n'avait jamais écouté les conseils, trop confiant en lui, on remis en question son autorité.

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Rocco a raison, c'est une lettre du courrier des lecteurs, mais que lorsque je l'ai lue représentait exactement le fond de ma pensée.

 

Le fait qu'il n'y ait pas de PDG, donc aucun responsable me rend malade.

 

Mais plus loin, le fait que Jean Charest aie modifié la loi en 2004 pour que la caisse se concentre sur les rendements, et qu'il refuse de donner des informations sur les pertes lors des dernières élections lorsque les deux partis d'opposition les demandais, ça c'est le boute!

 

Il a ainsi volé les élection et détourné le mandat de la Caisse.

 

Cet argent devait être investit pour développer le Québec.

 

Certes il y aurait eut des pertes quand même, mais bien moindre, car le taux de change a coûté $10 milliard, et les entreprises américaines ont piqué du nez pas mal plus que les canadiennes. Sans parler des PCAA que je n'ai toujours pas compris comment ça marche, même après 1 an qu'on me l'explique.

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Écoute la plupart des pertes (mêmes les PCAA) sont sur papier... ça veut dire que oui au bilan annuel (photo annuel des valeurs) il y a une perte.

 

Par contre, les pertes ne sont pas réalisés puisque la caisse détiens encore ces actifs qui vont redécoller à un moment donné...

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Le PCAA c'est de la perte sèche... les hypothèques ont fait faillite, elles ne reviendront jamais.

 

Les actions de AIG, CITIGROUP, BELL et cie (toutes des positions détenues par la Caisse), soit ça ne reprendra jamais et ça fera faillite, soit ça va prendre des années, des années...

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