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Arts technologique


Normand Hamel

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Comment Montréal est-elle devenue une plaque tournante des arts technologiques?

Que ce soit dans les musées, sur les scènes de spectacle ou encore au cirque, les arts numériques sont partout. À Montréal, une poignée de personnes passionnées ont flairé la bonne affaire, il y a près de 30 ans, permettant à la métropole de se hisser comme leader de cette forme d’art tentaculaire.

Le festival MUTEK, qui se déroule jusqu'au 27 août, a été l’un des fers de lance de cette petite révolution, avec ses spectacles de musique et de création numérique avant-gardiste.

À l'époque de sa fondation, dans les années 1990, peu de gens pouvaient imaginer que les nouvelles technologies allaient bientôt populariser des expositions sans tableaux, comme celle de Frida Khalo, ou encore permettre des expériences de réalité virtuelle qui allaient nous transporter jusque dans l’espace.

La création numérique était vue comme un phénomène éphémère, réservé aux adeptes de soirées dansantes et de substances psychoactives. Le fondateur de MUTEK, Alain Mongeau, lui, mesurait son immense potentiel culturel.

J’étais un peu frustré parce que je voyais que Montréal et l’Amérique du Nord avaient plusieurs trains de retard par rapport à ce qui se passait en Europe, se rappelle-t-il. Et je ne pouvais pas déménager, car je venais d’avoir un enfant. Alors, j’ai décidé de mettre la main à la pâte pour essayer de rendre Montréal intéressante.

C'est ainsi qu'en 1996, Alain Mongeau a cofondé avec Monique Savoie et Luc Courchesne la Société des arts technologiques (SAT), un centre de recherche, de création et de formation devenu incontournable à Montréal. Puis, en 1999, c’était au tour de MUTEK de prendre son envol.

Alain Mongeau a été assez visionnaire, car parler d’art et de technologie en 1996, 1997, ce n’était pas très accepté, les outils n’étaient pas très démocratisés, estime Jenny Thibault, directrice générale de la SAT. Moi, j’ai eu ma boîte courriel en 2000!

Au même moment, un politicien décidait, lui aussi, de miser sur les nouvelles technologies. Bernard Landry, alors ministre des Finances du Québec, a lancé en 1996 un généreux crédit d’impôt aux entreprises multimédias, faisant de la province une terre promise pour l’industrie des jeux vidéo. Il a également convaincu Ubisoft de s’installer à Montréal.

Ça a créé un écosystème fertile et fécond pour former des talents, poursuit Jenny Thibault. À Montréal, on est bon pour former des développeurs, des intégrateurs, des programmeurs, et on a beaucoup d’écoles spécialisées, car on avait cette industrie des jeux vidéo à nourrir.

La naissance d'une industrie

Durant cette période bouillonnante, on a notamment vu naître Elektra (1999), qui est à l’origine de la Biennale internationale d'art numérique à Montréal, et Moment Factory (2001), un studio de divertissement multimédia montréalais de renommée internationale.

Les raves et les afterhours étaient vraiment des lieux où on pouvait faire de l’expérimentation, où l’innovation était encouragée, et c’est devenu une locomotive pour le milieu des arts numériques, raconte Catherine Turp, directrice de la création et de l’innovation chez Moment Factory.

Des lieux comme la SAT et des événements comme MUTEK nous ont permis de nous rassembler, d’avoir un croisement entre les disciplines, de créer une communauté, mais aussi d'asseoir ces pratiques-là à l’intérieur d’une nouvelle forme d’art.

Aujourd’hui, on retrouve les bureaux de Moment Factory à Paris, à Tokyo, à New York et à Singapour. L’entreprise collabore avec des artistes comme The Killers et Billie Eilish, et pilote des projets immersifs en tout genre dans plusieurs des grandes villes de la planète.

Montréal est aussi choyée par son riche écosystème étudiant, fait remarquer Robert Normandeau, professeur associé à la Faculté de musique de l’Université de Montréal, et poids lourd de la musique électroacoustique au Québec.

Avec ses quatre universités et son conservatoire de musique, la métropole est abreuvée d’une quantité impressionnante de jeunes talents, ce qui contribue à en faire la capitale des musiques expérimentales et électroacoustiques en Amérique du Nord, selon lui.

Le professeur souligne que l’écologie artistique importante de Montréal permet à beaucoup de finissants et de finissantes de sa faculté de gagner leur pain en composant de la musique pour le milieu du théâtre, de la danse, des jeux vidéo ou encore de la postproduction.

Soutenir l'art technologique

N’empêche, l’art technologique n’est pas encore reconnu à sa juste valeur par les institutions gouvernementales, selon plusieurs intervenants et intervenantes rencontrés. Et ce, malgré l’intérêt grandissant du public et des artistes pour le numérique.

Oasis immersion, plus grand lieu destiné à l’art immersif déambulatoire au Canada, a ouvert ses portes au Palais des congrès de Montréal durant la pandémie. MUTEK, quant à lui, a reçu un nombre record de propositions de projets cette année.

Et le Conseil des arts de Montréal, de son côté, dit être de plus en plus sollicité par des d’artistes adeptes de création numérique.

On avait une longueur d’avance [sur les autres pays], mais est-ce qu’on l’a encore? Je ne sais pas, laisse tomber Jenny Thibault. La directrice générale de la SAT montre du doigt la vision de la France ou encore de Taiwan, qui ont investi massivement la scène numérique ces dernières années.

Car la créativité numérique coûte cher. La SAT le sait bien, elle qui vient de rouvrir son dôme, une immense structure de projection immersive, après de coûteux travaux.

Et contrairement au secteur des jeux vidéo, celui des arts numériques est encore en train de prouver ses modèles d’affaires, ce qui complique les demandes de financement.

On commence à avoir des success-stories. On commence à avoir des projets qui ont rayonné à l’international et qui ont eu des retombées commerciales intéressantes, souligne toutefois Jenny Thibault.

Alain Mongeau, qui a piloté MUTEK jusqu'à Barcelone, Buenos Aires, Mexico et Tokyo, reste vigilant lui aussi. On ne peut pas s’asseoir sur nos lauriers. Le financement reste toujours un problème, surtout avec la sortie de la pandémie, et le coût de la vie qui a explosé.

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2006147/montreal-art-technologique-mutek-sat-industrie

 

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