Aller au contenu

Cahier Architecture de Devoir - Weekend du 25 et 26 avril 2009


Atze

Messages recommendés

Les cahiers spéciaux du Devoir ressemblent souvent à un gros publi-postage, mais je mets tout de même les articles pour ceux que ça pourraient intéresser.

 

 

Il est parmi nous une visionnaire

 

Le Devoir

Normand Thériault

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Phyllis Lambert, Centre canadien d'architecture, Municipalité, Culture, Montréal, Canada (Pays)

 

Le Centre canadien d'architecture est un établissement unique

Nous sommes en 1979. Le secteur ouest de la ville est menacé par des tentatives de transformation extrême. La Maison Shaughnessy devait être détruite. Non seulement elle sera sauvée, mais sur son site un nouvel établissement surgira: Phyllis Lambert inaugure en 1989 le Centre canadien d'architecture.

 

A l'époque où je concevais Aurora Borealis pour le Centre international d'art contemporain, cette exposition qui n'allait durer que 100 jours, plus loin à l'ouest de la ville un projet d'une plus grande envergure était en gestation. Une Phyllis Lambert, celle-là même qui avait participé avec le grand Mies à la mise en forme et en place de l'édifice Seagram à New York en 1954, non seulement oeuvrait à sauver la Maison Shaughnessy du pic des démolisseurs, mais elle allait y joindre un nouveau bâtiment: ce double ensemble est aujourd'hui mondialement connu sous le nom de Centre canadien d'architecture, maintenant nommé le CCA dans le jargon des spécialistes comme par le grand public.

 

Cette année-là, c'était 1985, et il allait falloir attendre encore quatre ans avant l'inauguration en 1989, soit dix ans après que le projet d'un musée unique entièrement dévolu à l'architecture et à l'urbanisme a été lancé par sa conceptrice.

 

Noble musée

 

Si, à la même époque, un autre musée, celui des beaux-arts, celui de la rue Sherbrooke, prenait la tendance «grand public», à savoir que les expositions devaient être faites pour attirer d'abord les foules, celle qu'on peut désigner, et de façon laudative, comme «la dame de fer de l'architecture» avait, pour son futur musée, une toute autre idée: il serait un lieu qui tiendrait à la fois de la bibliothèque, dans son sens le plus noble, du laboratoire, par ses expositions et les débats qui s'y tiendraient, du lieu «agit-prop», par les contenus et les propositions qui y seraient déposés, et du musée, entendu comme un édifice où on collectionne et conserve l'héritage du passé et le patrimoine du futur.

 

Et l'écrin, la bâtisse elle-même, par l'organisation de l'espace comme par le choix des matériaux, sera lui aussi une ode à l'architecture, celle d'une tradition qui veut que les formes soient épurées, le concept, perceptible, pour créer ainsi un lieu où c'est la vie qui l'habite qui est communiquée, non le motif qui pourrait parer l'ensemble.

 

Et il y avait plus, même. Le Centre canadien d'architecture était aussi né sur un site qui avait dans un premier temps été sauvé d'une certaine «folie», celle qui voulait qu'on démolisse le Montréal historique pour y aménager des tours, comme à Manhattan. Les actions d'une Lambert avaient fait en sorte que la Maison Shaughnessy ne fut pas démolie et qu'autour d'elle un quartier vivant fut maintenu, et non transformé en territoire autoroutier. Un jardin même y était accolé, lieu de transition entre les plateaux sud et nord de la ville. Les complices, autres artistes du projet, de cette action avaient nom Peter Rose et Melvin Charney.

 

Heureuse ville

 

Dix ans plus tard, nous sommes en 1995 et le CCA est maintenant ouvert au public depuis six ans. Phyllis Lambert vint cette année-là témoigner devant la Commission d'enquête sur la situation des arts visuels au Québec: elle déplora alors le peu de soutien qu'elle recevait de l'État, indépendamment des paliers de gouvernement. Plus tard, elle aura une fois de plus à admettre que, si on parle d'excellence pour justifier l'attribution de toute aide, il est un autre critère qui explique le fonctionnement du système: l'économie budgétaire explique que tout vient au compte-gouttes et qu'il ne peut y avoir de dérogation, la qualité de tout projet devant céder devant le fait que le statu quo a prépondérance sur toute nouvelle initiative.

 

Non seulement Mme Lambert sera donc l'instigatrice d'un projet unique sur la scène internationale, mais elle en deviendra aussi la première mécène à le soutenir. En pratique, vingt ans après son ouverture, même le secteur privé accorde encore un appui qu'on peut qualifier de modeste, si cet appui est évalué à l'aune d'une échelle qui prévaudrait dans les grandes métropoles. Pourtant, une telle situation financière n'a pas empêché que les collections de l'établissement sont aujourd'hui majeures dans le monde de l'architecture et que les chercheurs qui y travaillent considèrent que l'invitation qui leur est faite tient plus du privilège reçu que d'une simple reconnaissance de leur talent. De Toronto à New York, comme en Europe, on se féliciterait d'avoir en son lieu ce CCA dont Phyllis Lambert a fait cadeau à sa ville, Montréal.

 

L'avenir seul nous dira si la métropole québécoise aura su se montrer digne d'un tel don. En attendant, qui le visite sait comme le lieu est agréable à vivre, pour qui comprend qu'une architecture est un moyen donné pour aider à mieux vivre. Et à mieux penser.

 

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247333.html (26 avril 2009 11H11)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Phyllis Lambert - « Mon cauchemar, ce sont les occasions manquées »

 

Le Devoir

Catherine Lalonde

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Phyllis Lambert, Centre canadien d'architecture, Culture, Montréal, Canada (Pays)

 

Il y a 20 ans, notre « dame de fer » inaugurait le Centre canadien d'architecture

 

Phyllis Lambert devant le Centre canadien d'architecture

 

lam_jg_250409.jpg

Photo: Jacques Grenier

 

À 81 ans bien sonnés, Phyllis Lambert, la directrice fondatrice du Centre canadien d'architecture, mène son monde à la baguette avec une indomptable énergie. Le Centre canadien d'architecture (CCA) fête cette année son vingtième anniversaire. Et Phyllis Lambert, elle, a déjà en tête de nouveaux projets pour améliorer la ville.

 

«Ces 20 ans me semblent très loin et très près, analyse Phyllis Lambert en entrevue, dans son français tacheté d'un accent anglais. Le CCA n'est pas né seulement autour d'une collection. Il y avait un établissement à construire, des chercheurs à amener.»

 

Musée dédié à l'architecture et sa pensée, le Centre canadien d'architecture (CCA) est aussi un centre de recherche qui veut «améliorer la qualité de l'environnement bâti [et] forger le discours actuel sur l'architecture». C'est une collection née des archives d'abord montées par Lambert et qui s'est enrichie au fil du temps: 55 000 photos, 100 000 dessins et estampes, 150 archives. C'est aussi un édifice conçu par Peter Rose et intégré à la maison historique Shaughnessy. Ce sont les expositions, les actions réalisées en périphérie pour alimenter la réflexion sociale et citoyenne. Et le Centre d'étude, qui invite chercheurs et étudiants à brasser leurs idées sur l'architecture.

 

Héritière de l'empire Bronfman, passionnée d'architecture, Phyllis Lambert entre avec fracas sur la scène mondiale en 1954 comme directrice de la planification de l'édifice Seagram de New York. Conçu par son mentor, l'architecte Mies van der Rohe, l'immeuble est devenu depuis un incontournable. Lambert ne s'est pas arrêtée là: architecte, philanthrope, docteure honorifique de 27 universités, fondatrice d'Héritage Montréal et du Fonds d'investissement de Montréal, elle participe maintenant au projet de revitalisation du centre-ville ouest et parle avec passion de la table de concertation menée avec l'arrondissement Ville-Marie. Comme si ce n'était pas assez, elle poursuit la rédaction d'un livre sur l'édifice Seagram.

 

À propos du Centre canadien d'architecture, Lambert est fière de voir à quel point il s'est bien intégré. «Le CCA devient de plus en plus engagé avec la ville, avec les citoyens de Montréal. Que ce soit dans ses expositions, dans ses programmes, dans ses explorations du samedi. On s'intéresse aux questions sociales et sociétales: par exemple, comment fleurir la ville? Comment faire pour manger mieux et pas trop cher en ville?» Le CCA veut rester en phase avec les problématiques de l'heure. «Actuellement, poursuit Lambert, le grand problème des villes, c'est l'écologie, la conservation et le développement durable.»

 

Le pire de Montréal

 

Quand on lui demande quel est, à Montréal, son cauchemar d'architecte, Lambert prend une longue pause avant de répondre. «Mon cauchemar, ce sont les occasions manquées. Comme Griffintown. Si on avait eu un bon processus, on aurait pu faire quelque chose de bien. Mais ç'a été si mal géré qu'on n'a rien fait. Il n'y a pas eu de table de concertation, c'était une grande erreur. Tous les mauvais bâtiments que nous avons, comme ceux de la rue Président-Kennedy, arrivent quand les choses ne sont pas bien pensées. L'autre cauchemar, c'est de prendre des sites magnifiques, comme le boisé du Collège de Montréal, et d'en faire de grands développements qui nuisent. Une des horreurs, c'est aussi de prendre des solutions venues d'autres villes, sans penser globalement. On a besoin de penser avant d'agir.» À l'inverse, Lambert est ravie de la transformation du Quartier international de Montréal, autour du square Victoria. «C'est génial!» Elle attend beaucoup du futur Quartier des spectacles.

 

Si Lambert ne surveille désormais que de loin l'évolution de la collection du CCA, elle sait l'importance de garder les témoignages. «On cherche des objets qui ont des liens entre eux. Des livres, des dessins, des jouets sur un même thème. Ces objets sont une indication de la pensée sur l'architecture. [ils illustrent] les relations de l'architecte avec le client, avec les règlements de la Ville, avec l'environnement. Ce qui est intéressant lorsqu'on entre dans les archives, c'est de suivre les idées à travers les notes. Là, on arrive à l'essence de la chose. Et à comprendre.»

 

20 ans, 20 heures

 

Pour célébrer ses 20 ans, le CCA organise, le samedi 2 mai, une grande fête pour tous étalée sur 20 heures consécutives. Et, tout au long de l'année, le Centre d'étude propose 20 événements publics avec des spécialistes issus de différents domaines, sur les questions architecturales actuelles. Du côté des expositions, on pourra voir La Vitesse et ses limites, du 19 mai au 12 octobre, sur le centième anniversaire du futurisme italien. Et, jusqu'au 23 août, Environnement total: Montréal, 1965-1975 s'attarde au concept d'architecture éphémère et à ses conséquences durables.

 

Que souhaite Phyllis Lambert au CCA pour les 20 prochaines années? «Qu'il maintienne fortement son mandat à Montréal, au Québec et dans le monde. Que ça demeure un endroit qui mène la pensée de ce que sont l'architecture et la ville et qu'il continue de sensibiliser les gens et d'encourager les architectes.»

 

Et que souhaiter à Phyllis Lambert pour ces mêmes prochains 20 ans? Elle éclate de rire: «J'aurai 100 ans! Si je suis en forme, je serai toujours en train de faire quelque chose, c'est sûr! En photographie peut-être, ou en train de faire d'autres livres», dit celle qui est fascinée par les prises de vue des bâtiments de pierres grises de Montréal. Et, avec cette énergie impitoyable, il ne serait pas surprenant de voir Phyllis Lambert encore dans les parages.

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

***

 

Pour plus d'information sur le CCA: http://www.cca.qc.ca.

 

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247330.html (26/4/2009 11H12)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Dinu Bumbaru - Le Centre a redonné à un quartier ses titres de noblesse

 

Le Devoir

Réginald Harvey

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Centre canadien d'architecture (CCA), Dinu Bumbaru, Architecture, Municipalité, Culture, Montréal, Canada (Pays)

 

Le Centre canadien d'architecture (CCA) a redonné fière allure à l'environnement urbain où il a pris racine à partir de 1989. En réalisant ce projet, Phyllis Lambert et son équipe ont largement contribué à revamper des lieux dévastés.

 

Au début du XXe siècle, 70 % des habitants les mieux nantis du Canada vivaient dans ces espaces privilégiés qui s'étendaient du pied du mont Royal vers le fleuve, dans l'ouest de l'île de Montréal. Puis, le temps a coulé jusqu'aux années situées entre les deux grandes guerres. À partir de là, le quartier s'est remodelé selon les aléas de la vie socioéconomique. Tant et si bien qu'il était devenu méconnaissable dans les années 1970, défiguré qu'il était notamment par la présence de tronçons routiers et ferroviaires ravageurs.

 

Directeur des politiques auprès d'Héritage Montréal, Dinu Bumbaru décrit ce milieu de vie vers le début des années 1900: «C'était l'un des quartiers les plus prestigieux de tout le pays, coast to coast. Il y avait dans ce Square Mile une concentration de grandes familles; il a même été qualifié de Golden Square Mile. Ce territoire était située entre le mont Royal et la rue Dorchester, qui a été rebaptisée boulevard René-Lévesque, entre l'avenue du Parc et la rue Atwater. Il y avait là une concentration de gens fortunés qui ne sera jamais plus égalée dans le Canada de l'avenir.»

 

Quartier architectural

 

Le quartier possédait une personnalité architecturale: «Les demeures qui se retrouvaient à cet endroit, sans être aussi opulentes que celles des richissimes Américains, possédaient de grandes qualités conférées par des architectes. C'était un quartier où il n'y avait pas juste des briqueleurs; il y avait de l'architecture parce qu'on retrouvait des professionnels qui élaboraient des plans avant de monter les constructions. Il y avait également des tailleurs de pierre et des sculpteurs qui participaient à l'édification des bâtiments. Il y avait une espèce de consensus qui s'était établi et qui voulait qu'il s'agisse de la nouvelle ville de Montréal qui serait située là; d'ailleurs, ça s'appelait le "Newtown".»

 

Ces luxueuses demeures baignent dans un environnement qui leur est propre: «Il y avait, autour de cela, une vie sociale créée par les jardins, les réceptions et les grandes salles de bal. Mis à part ces maisons, on a même construit le Ritz Carlton et le Victoria Skating Rink, ou patinoire Victoria, située rue Drummond où se trouve aujourd'hui le Sheraton, qui a vu naître le hockey à Montréal et là où se déroulaient aussi des bals masqués.» À bien des égards, le Square Mile est très riche sur le plan historique.

 

Le progrès s'installe en ville

 

Avant la Deuxième Guerre mondiale, les réalités socioéconomiques ont entraîné une détérioration graduelle du milieu, comme le rapporte M. Bumbaru: «C'était pour des raisons économiques, mais il y avait également une transformation du tissu urbain: l'arrivée de la voie ferrée qui conduit à la gare Windsor a créé une séparation dans le talus de la rue Dorchester et a causé d'autres nuisances. On voit alors des maisons victoriennes qui se convertissent en commerces et en services de restauration; rue Dorchester toujours, la circulation s'amplifie le long des villas dans les années 1920, avec l'installation d'hôtels et de gros garages, au moment où l'automobile commence à prendre sa place dans la ville.»

 

Le résultat des mutations apparaît: «Les grandes demeures sont délaissées et les familles migrent vers Westmount ou vers l'ouest de l'île..» De plus, une vague de démolition des maisons se produit dans les années 1950. Les autoroutes se pointent à leur tour dans le paysage et la maison Shaughnessy est désormais enserrée entre deux bretelles de ces voies de circulation, qui passent sous les voies ferrées.

 

Le réveil sonne finalement

 

Dans les années 1970, le climat change à l'endroit d'un patrimoine plutôt traité avec mépris: toute la société montréalaise manifeste son mécontentement à la suite de la démolition de la Maison Van Horne, située rue Sherbrooke à l'angle de Stanley, en 1973. «Les journaux se positionnent. Les mouvements de citoyens s'organisent et cet éveil va conduire aux gestes pionniers de Phyllis Lambert.»

 

À la fin des années 1970, le gouvernement québécois invite la Ville à prendre ses responsabilités. Les gens de Sauvons Montréal et d'autres mouvements communiquent avec Mme Lambert, bien au fait qu'ils sont de son intérêt pour Montréal et son architecture.

 

Dinu Bumbaru indique que cette dernière a été touchée et qu'elle s'est alors investie dans plusieurs dossiers importants, dont l'un d'eux retient particulièrement l'attention: «On pense à la maison Shaughnessy, mais il ne faut pas oublier le dossier majeur qu'est Milton-Parc. Dans ce cas, il ne s'agit pas de la collection d'objets architecturaux, mais on parle de la notion de sauvegarde d'un quartier vivant au centre-ville. C'est dans cet esprit qu'il faut situer le geste qu'elle a posé pour le Centre canadien d'architecture (CCA), qui en est un de remise en valeur de tout un ensemble.»

 

La renaissance de tout un milieu

 

Il aura fallu compter une dizaine d'années pour réaliser le projet du CCA, ce qui indique bien que ce n'était pas une mince tâche: «Au fond, c'est un centre culturel, c'est une maison de l'architecture qu'on a édifiée à cet endroit.» Dans le cas de la maison Shaughnessy, elle a été sauvée grâce à la réalisation de ce projet et à l'application des règles de l'art pour sa restauration. Elle est devenue un endroit de convivialité qui est doté d'une valeur symbolique et emblématique.

 

Tout le milieu a ressenti les effets positifs de la présence du Centre: «C'est un point important, parce qu'il a créé un espace public accessible et entretenu en raison de la présence des jardins du CCA; il s'est créé un espace de voisinage. Le quartier en question, le village Shaughnessy, présente un ensemble intéressant, parce qu'il y avait là des gens qui avaient résisté à leur exil du centre-ville, des gens qui étaient des résidants endurcis et des pionniers. Par ses espaces publics, le Centre les soutient à sa façon dans leur mission d'urbanité.»

 

***

 

Collaborateur du Devoir

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247329.html (26/4/2009 11H15)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Construire le CCA - « À l'époque, on détruisait toute la ville... »

 

Le Devoir

Jessica Nadeau

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Peter Rose, Melvin Charney, Centre canadien d'architecture, Culture, Municipalité, Montréal, Canada (Pays)

 

Le travail de Rose et Charney a été mondialement reconnu

 

Gagnants de plusieurs prix et reconnaissances internationales pour l'aménagement du CCA et de ses jardins, l'architecte Peter Rose et l'artiste Melvin Charney ont changé le paysage culturel de Montréal et mené la métropole à l'avant-scène mondiale en matière d'architecture et de design.

 

Une maison en décrépitude, des terrains vagues négligés, une autoroute grise et des rampes d'accès qui débordent sur un boulevard achalandé... C'est autour de ces contraintes que devait s'ériger le futur site du Centre canadien d'architecture (CCA), un musée et un centre de recherche consacrés à l'architecture, qui est devenu aujourd'hui une véritable référence en la matière. «À l'époque -- c'est difficile à imaginer aujourd'hui -- on détruisait toute la ville pour faire de grands projets qui avaient un résultat très négatif sur l'ensemble urbain, se rappelle l'architecte Peter Rose, qui pratique désormais à Boston et enseigne à la prestigieuse Université Harvard. Les promoteurs faisaient n'importe quoi et personne ne semblait s'en rendre compte, à l'exception des architectes et de quelques intellectuels qui avaient une certaine vision de la ville. Il fallait qu'il se passe quelque chose. Et ce fut le CCA.»

 

Le défi était de taille pour ce jeune architecte et les contraintes s'avéraient nombreuses. Il fallait une vision claire. Cette vision, c'était celle d'une récupération urbaine. «C'était un site brisé, cassé par le développement. La présence des rampes d'autoroute était dominante et son effet sur le site était comme une blessure, qu'il fallait rattraper le plus rapidement possible afin d'éviter que tout ne s'effondre autour.»

 

La principale contrainte consistait à ériger le nouveau bâtiment autour de la maison Shaughnessy, sise boulevard René-Lévesque, une maison historique datant de 1874 et ayant été récupérée et restaurée par la fondatrice du CCA, Phyllis Lambert.

 

Intégration

 

Puisqu'il était interdit d'arrêter dans l'artère René-Lévesque au moment de la construction, dans les années 1980, Rose n'a eu d'autre choix que d'intégrer le nouveau bâtiment par l'arrière, là où s'élève désormais l'imposante façade du CCA. Pour rétablir le lien avec la maison Shaughnessy au sud, l'architecte a choisi d'ajouter deux bâtiments sur les côtés, selon une symétrie bilatérale, qui recréent les références à l'ancien bâtiment au centre.

 

«C'était très complexe, il fallait recréer un bâtiment plus ou moins symétrique comme la maison Shaughnessy, qui avait deux entrées principales. Tout était en double. J'ai joué avec ce fait-là sur le bâtiment principal. Mais le principal lien était le matériel, la pierre grise qui est spécifique à Montréal et qui rappelle la pierre de la maison Shaughnessy.»

 

Plusieurs centaines de croquis plus tard, le CCA a vu le jour et a reçu de nombreux prix de design aux États-Unis et en Europe. L'architecte, lui, s'est vu décerner le National Award de l'American Institute of Architects ainsi que la médaille du gouverneur général pour l'architecture. «Je suis très fier; la reconnaissance fait toujours du bien, mais ce qui est le plus gratifiant, c'est de voir que, vingt ans plus tard, ce bâtiment existe, qu'il a une vie en soi, qu'il joue un rôle important à Montréal comme à l'étranger et qu'il a changé la vision des Montréalais sur l'architecture.»

 

Les jardins

 

Peter Rose n'est pas le seul à avoir récolté les hommages pour son travail au CCA. L'artiste montréalais Melvin Charney, qui a élaboré les jardins faisant face au musée, du côté sud du boulevard René-Lévesque, s'est vu salué de par le monde pour son remarquable travail.

 

Aux yeux de l'artiste multidisciplinaire, ce terrain vague et abandonné, coincé entre deux sorties d'autoroute, n'était pas le «déchet urbain» que les autres voyaient. C'était une pièce d'histoire de la ville de Montréal. «C'était un coin très unique qui m'inspirait, car il se trouve au-dessus d'une falaise qui a une histoire géologique très importante, créée par le recul de l'eau après la dernière époque de glaciation [...]. Ce n'était pas un terrain vague, c'était une vision radicale.»

 

Inspiré par l'histoire de Montréal et de ses quartiers populaires où il a grandi, Charney a voulu redonner ses lettres de noblesse à cet îlot urbain en créant «un petit paradis terrestre où se mêlent passé et présent de la ville et de l'architecture». Les yeux brillants en feuilletant de vieux plans, Melvin Charney se rappelle chaque détail. Son premier dessin a été celui représentant les maintes couches d'histoire cachées sous la terre qu'il voulait rendre visibles.

 

Selon lui, le jardin urbain est la réplique à ciel ouvert du CCA, un musée en plein air accessible à tous et en tout temps. C'est pourquoi il a recréé la composition tripartite du musée avec le verger à l'est, le pré à l'ouest et l'Arcade au centre qui renvoie à la maison Shaughnessy située de l'autre côté du boulevard.

 

Rien n'a été laissé au hasard. Chaque ligne est calculée en fonction des anciens cadastres, qui viennent renforcer l'effet de symétrie décalée par rapport au musée. Sur le site même du jardin, tout est dédoublé pour renforcer l'effet.

 

Sur l'esplanade, les colonnes allégoriques sont des interprétations personnelles de l'artiste sur le thème de l'architecture qui renvoient à un élément de la ville qu'on peut apercevoir du promontoire, dans ce qui reste des quartiers industriels des siècles derniers: les silos à céréales de la basse ville, les deux clochers de l'église Sainte-Cunégonde ou les cheminées des usines. «Chaque sculpture fait référence à un morceau d'histoire de la ville, et plus on approche du bâtiment, plus elles deviennent abstraites», explique le maître d'oeuvre des jardins.

 

Pour amener les passants à prendre possession des lieux et pour créer un effet de ville-spectacle où chacun aime voir et être vu, il a surélevé le jardin tel un théâtre, ce qui a pour double effet d'effacer un peu la congestion visuelle créée par l'autoroute et les rampes d'accès. Interdiction, par la Ville, d'installer des bancs? Il déjoue la réglementation en créant plein d'endroits propices -- même sur ses propres sculptures -- où les gens peuvent s'asseoir en toute simplicité. «D'ailleurs, on s'y sent mieux parce qu'on n'a pas l'obligation d'être assis», affirme l'artiste d'un ton moqueur.

 

Vingt ans plus tard, l'artiste aime toujours autant se rendre sur les lieux pour contempler l'évolution de son oeuvre. «Il y a eu quelques surprises en cours de route, mais, avec la végétation qui compte notamment 8000 rosiers, ç'a pris plusieurs années pour que le site soit dans l'état qu'il est maintenant. Et j'adore m'y retrouver. Je sens toujours beaucoup de repos dans ce petit coin arraché entre deux sorties d'autoroute. C'était l'idée de départ et je suis heureux que les Montréalais puissent en profiter.»

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247331.html (26/4/2009 11H16)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Vu d'ailleurs - « Un établissement essentiel pour l'architecture »

 

Le Devoir

Émilie Corriveau

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Culture, Centre canadien d'architecture, Municipalité, Musée, Montréal, Canada (Pays)

 

Un centre unique s'impose dans l'univers muséal

«Les plus grands produits de l'architecture sont moins des oeuvres individuelles que des oeuvres sociales», écrivait Victor Hugo. Le Centre canadien d'architecture (CCA), à la fois centre de recherche international et musée consacré à la valorisation de la culture architecturale, s'inscrit certes comme l'un de ces grands produits. Depuis ses débuts, il a réussi à susciter un enthousiasme mondial pour son champ d'étude et s'est taillé une enviable réputation à l'échelle planétaire.

 

Fondé en 1979 par Phyllis Lambert, architecte de renommée internationale, puis ouvert au public en 1989, le Centre canadien d'architecture (CCA) joue aujourd'hui un rôle de laboratoire interdisciplinaire. Par ses programmes publics et éducatifs, ses expositions, ses publications, sa collection et son programme d'accueil des chercheurs, le CCA encourage la recherche et stimule l'inventivité dans la pratique du design, tout en sensibilisant la population à l'importance de l'architecture dans la société.

 

Véritable caverne d'Ali Baba, le CCA possède l'une des plus importantes collections mondiales d'architecture, dont les oeuvres datent de la Renaissance à aujourd'hui. D'une opulence impressionnante, son corpus se résume à environ 200 000 périodiques, 100 000 dessins et estampes, 55 000 photographies et 150 archives. À travers le monde entier, les architectes et les fervents de design n'ont que de bons mots à son sujet.

 

«Je crois que le Centre canadien d'architecture est certainement l'un des établissements archivistiques les plus importants au monde dans le domaine. Ses programmes très développés et ses expositions ont largement contribué à la lecture que nous faisons aujourd'hui de l'architecture. Il y a très peu d'endroits dans le monde qui abritent des collections aussi complètes, aussi imposantes, et qui les mettent en valeur avec autant de vigueur», soutient Aaron Betsky, directeur du Cincinnati Art Museum.

 

En effet, les comparaisons sont plutôt difficiles à établir. Certains parlent de ressemblances avec la Cité de l'architecture et du patrimoine à Paris ou encore avec le Musée d'architecture de l'Université technique de Munich, mais, pour la plupart, la spécificité du CCA est telle que tout parallèle paraît bancal.

 

«Ma mère dit que les comparaisons sont toujours odieuses. C'est certainement le cas ici», lance sur un ton badin Glenn Lowry, directeur du Museum of Modern Art (MoMA) à New York, souvent qualifié de musée d'art moderne le plus influent au monde.

 

Une portée internationale

 

Inauguré en 1997, le Centre d'étude du CCA a accueilli plus d'une centaine d'architectes, de théoriciens et de spécialistes provenant de partout dans le monde. L'institut international, qui se dédie à la recherche portant sur les différents aspects de la pensée et de la pratique architecturales, a permis à de nombreux étudiants et chercheurs d'étoffer leurs travaux.

 

Avant-gardiste, le CCA présente aussi chaque année des expositions qui sortent des sentiers battus. Au fil des ans, plusieurs architectes de renommée internationale y ont laissé leur empreinte. Peter Eisenman, Jacques Herzog, Pierre de Meuron, Cedric Price, Aldo Rossi, James Stirling et Gordon Matta Clark, pour ne nommer qu'eux, y ont tous exposé leurs travaux et, du même coup, écrit une page d'histoire.

 

«Plusieurs des expositions présentées sont réellement audacieuses. Je crois que, à travers les années, celles-ci nous ont aidés à comprendre l'architecture et à réorganiser notre vie quotidienne ainsi que notre environnement. Il s'agit, à mon avis, d'une très importante contribution au domaine de l'architecture et à notre culture», estime Aaron Betsky.

 

Un bâtiment à la hauteur

 

En plus d'être salué pour ses expositions, ses programmes et sa collection, le CCA est reconnu internationalement pour la singularité de son édifice. Conçu par l'architecte Peter Rose, en collaboration avec Phyllis Lambert et Erol Argun, celui-ci intègre la maison historique Shaughnessy et le jardin de Melvin Charney. Les lieux abritent un théâtre, une librairie, des salles d'exposition, une bibliothèque, des bureaux, un centre d'étude ainsi que des laboratoires de restauration et des réserves.

 

«C'est un bâtiment autant moderne que classique. Son design est tellement sensible qu'il reflète extrêmement bien le dialogue entre l'histoire et le présent et inclut toutes les tendances de l'architecture montréalaise dans une même bâtisse», remarque Glenn Lowry.

 

Nul n'est prophète en son pays

 

Comme le dit l'adage, nul n'est prophète en son pays. Aux yeux de plusieurs architectes, artistes et directeurs de musée, la collectivité montréalaise ne semble pas concevoir l'immense portée du Centre canadien d'architecture. C'est ce que croit notamment Peter Eisenman, le célèbre architecte de la décomposition.

 

«Montréal est une ville fantastique, très cosmopolite. On y trouve d'excellents restaurants, de grands artistes, de la bonne musique, mais la collectivité montréalaise ne semble pas répondre à ce joyau de l'architecture comme elle le devrait! Le Centre canadien d'architecture a fait des choses extraordinaires et est reconnu à travers le monde, mais les Montréalais ne paraissent toujours pas se rendre compte qu'ils ont accès à un établissement très précieux. Il m'apparaît important que la collectivité se mobilise davantage et soit plus enthousiaste», avance-t-il.

 

Pour Glenn Lowry, la portée du CCA est incontestable: «Le Centre canadien d'architecture est aujourd'hui un établissement essentiel pour l'architecture, pas uniquement au Canada, mais dans le monde entier. C'est vraiment un accomplissement de Phyllis Lambert que d'avoir réussi en 20 ans à créer un centre dont l'espace physique est à Montréal, mais qui se veut également un projet de recherche d'une importance mondiale. En plus, le projet n'est pas complet! Ça ne fait que 20 ans que le centre existe. Si on pense à tout ce qui a été accompli pendant cette période, on peut rêver pour les 20 prochaines années!»

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247332.html (26/4/2009 11h18)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

20 ans d'évolution - « Nous souhaitons continuer à jouer notre rôle dans le débat social »

 

Le Devoir

Martine Letarte

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Direction, Mirko Zardini, Centre canadien d'architecture, Culture, Canada (Pays), Montréal

 

Mirko Zardini assume avec fierté la direction du Centre

 

Mirko Zardini, directeur du Centre canadien d'architecture

 

Le Centre canadien d'architecture (CCA) a 20 ans. En constante évolution, l'établissement, unique en son genre, a su intéresser le grand public à l'architecture. Le CCA a aussi réussi à alimenter le débat public sur l'architecture et l'aménagement de l'espace, un rôle particulièrement cher à Mirko Zardini, directeur du CCA.

 

«C'est remarquable que le CCA, un établissement financé par le privé, soit toujours présent 20 ans après sa fondation», indique d'emblée M. Zardini, qui a eu auparavant une carrière d'architecte de réputation internationale.

 

Il faut dire que le défi d'intéresser le grand public à l'architecture était ambitieux. Pour y arriver, le CCA a misé sur le sens large et culturel de la discipline. «Nous ne voulions pas être un établissement qui présente seulement des dessins d'architectes, d'autant plus que c'est une discipline très spéciale, difficile à présenter. Nous voulons que les gens comprennent l'intérêt de ce qui leur est montré et développent une nouvelle attitude, une nouvelle conscience face à l'architecture», explique M. Zardini, qui se rend encore aujourd'hui dans les universités les plus prestigieuses comme Princeton et Harvard pour enseigner.

 

Le CCA a d'ailleurs toujours eu un rayonnement important à l'étranger grâce à ses multiples activités, comme ses expositions et ses publications, mais aussi depuis 1997, grâce à son Centre d'étude qui accueille chaque été une quarantaine de chercheurs actifs dans différentes disciplines. «Les chercheurs invités enrichissent nos expositions ou encore nous donnent de nouvelles idées d'expositions ou d'acquisitions. L'inverse se voit aussi: les recherches peuvent être inspirées d'un aspect d'une oeuvre exposée ou d'un objet d'une de nos collections», explique M. Zardini.

 

Une nouvelle interprétation de la mission

 

Depuis deux décennies, la mission du CCA est demeurée la même, mais son interprétation a changé pour suivre l'évolution de la société. Lors de sa création, le CCA devait d'abord affirmer l'importance de l'architecture, indique Mirko Zardini. «Or, aujourd'hui, cet objectif est atteint. Ce que nous avons à faire maintenant, c'est d'attirer l'attention sur des questions d'intérêt pour la société et de stimuler le débat public», explique-t-il.

 

Cette évolution se retrouve évidemment dans les expositions présentées au CCA. Au début, elles portaient sur l'architecture de façon plus générale. On pense par exemple à la toute première exposition, L'Architecture et son image, ou encore, la même année, à L'Interprétation par la technique. Photographie du CCA.

 

Par la suite, plus les années ont passé, plus le CCA a essayé de monter des expositions qui allaient rejoindre et intéresser le grand public. On pense par exemple à L'Architecture du réconfort: Les parcs thématiques de Disney, en 1997, ou, l'année suivante, à Surface du quotidien: La pelouse en Amérique.

 

Aujourd'hui, l'évolution se poursuit. «Nous sommes maintenant rendus à aborder davantage les enjeux contemporains, à mettre les choses en perspective, à prendre position», affirme M. Zardini.

 

Il fait référence ici à des expositions comme 1973: Désolé, plus d'essence, présentée en 2007. Entré en fonction en 2005, Mirko Zardini a donc agi en tant que conservateur en chef pour cette exposition, qui a donné lieu à la publication d'un livre portant sur l'innovation architecturale, en réponse à la crise pétrolière de 1973. Présentée jusqu'à la fin de semaine dernière, l'exposition Actions: comment s'approprier la ville allait aussi dans la voie de la prise de positions.

 

La façon de présenter le travail des architectes a aussi changé au CCA. M. Zardini remarque qu'auparavant l'établissement faisait davantage de monographies d'acteurs importants du monde de l'architecture. On pense à Friedrich Weinbrenner: L'architecte de Karlsruhe ou encore à Myron Goldsmith: Poète de la structure. «Maintenant, on en fait moins, affirme M. Zardini. On a plutôt tendance à réunir deux architectes autour d'un sujet important pour l'avenir de la société.»

 

Des exemples? Gilles Clément/Philippe Rahm - Environnement: manières d'agir pour demain (2006-2007) ou encore Perspectives de vie à Londres et à Tokyo imaginées par Stephen Taylor et Ryue Nishizawa (2008).

 

L'évolution continue

 

Ainsi, d'une certaine façon, le CCA prend maintenant position sur des enjeux importants qui touchent la société et l'architecture. Mis à part le fait que le CCA a acquis, au fil des ans, une solide réputation internationale, c'est cette volonté de Phyllis Lambert de faire du CCA un acteur important dans le débat social sur l'environnement urbain et sur l'évolution de l'architecture qui a convaincu Mirko Zardini d'accepter le poste de directeur.

 

D'ailleurs, à l'occasion des 20 ans du CCA, la direction de l'établissement souhaitait éviter les grandes expositions récapitulatives pour célébrer l'anniversaire. «Nous souhaitons plutôt continuer à jouer notre rôle dans le débat social, à alimenter les discussions», explique M. Zardini.

 

C'est ainsi que, dès le 19 mai, le CCA présentera La Vitesse et ses limites. L'exposition traite de la place importante qu'occupe la vitesse dans la vie moderne, de l'art à l'architecture et à l'urbanisme, en passant par les arts graphiques, l'économie, la culture matérielle et celle de l'information. En novembre, Autres odyssées de l'espace: Alessandro Poli (Superstudio), Michael Maltzan et Greg Lynn sera à l'affiche.

 

Ces deux expositions abordent les enjeux de la vitesse et de la technologie, indique M. Zardini. «Elles remettent en question les idées reçues comme quoi il est toujours mieux d'aller plus vite et de développer des technologies toujours plus puissantes, explique-t-il. Dans le fond, avec ces expositions, on remet en question ce qu'on appelle le progrès. Parce que, bien sûr, on a toujours tendance à voir les côtés positifs des avancées technologiques, mais il y a aussi des côtés plus sombres. C'est comme ça que nous participons au débat public.»

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247335.html (26/4/2009 11H19)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Regards d'ici - « Phyllis Lambert a élevé les normes d'excellence »

 

Le Devoir

Brigitte Saint-Pierre

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Architecture, Phyllis Lambert, Centre canadien d'architecture, Culture, Montréal, Canada (Pays)

 

Le CCA a contribué à montrer aux gens « les possibles de l'architecture »

 

exp_xz_250409.jpg

 

Vue de l'exposition consacrée en 2008 aux perspectives de vie à Londres et à Tokyo, imaginées par Stephen Taylor et Ryue Nishizawa.

À la fois centre international de recherche et musée, le Centre canadien d'architecture (CCA) a ouvert ses portes au public en 1989. Regards d'architectes montréalais et torontois sur cet établissement culturel.

 

«Très peu de personnes dans l'ensemble du pays ont élevé les normes d'excellence en architecture au niveau où Phyllis Lambert l'a fait», estime Bruce Kuwabara, architecte torontois, faisant ici référence au travail de la directrice et fondatrice du Centre canadien d'architecture (CCA) et à la qualité architecturale du bâtiment, des expositions et des programmes de l'établissement. M. Kuwabara fait valoir qu'il existe peu de centres semblables dans le monde. «Le CCA est un trésor international», affirme cet architecte, récipiendaire en 2006 de la Médaille d'or de l'Institut royal d'architecture du Canada et actuellement membre du conseil des fiduciaires du CCA.

 

Fondé en 1979, le CCA a ouvert ses portes au public dix ans plus tard. «Ça nous a interpellés dès le départ», raconte Gilles Saucier, architecte montréalais, qui mentionne que les débuts du musée coïncident à peu près avec ceux de la firme Saucier + Perrotte Architectes, fondée en 1988. «On voyait déjà que le CCA allait inscrire Montréal dans un horizon beaucoup plus large, un horizon international, et qu'il y amènerait des figures internationales, ce qui nous permettrait d'avoir cet autre regard-là, ce contact avec la scène internationale.»

 

Le CCA a en effet invité des architectes et des chercheurs en architecture de renommée internationale. Le Centre d'étude du CCA, inauguré en 1997, accueille notamment des chercheurs issus de différents pays, dans le cadre d'un programme de résidences soutenu par la Fondation Andrew-W.-Mellon. Le CCA a également organisé des débats publics entre penseurs et architectes de réputation internationale. L'établissement a ainsi invité Rem Koolhaas et Peter Eisenman en 2007, puis Greg Lynn et Yung Ho Chang l'année suivante.

 

Gilles Saucier apprécie la venue à Montréal de figures internationales de l'architecture. «Ça élargit nos horizons et c'est important. Nous, on travaille maintenant beaucoup plus vers l'international, et le CCA a certainement été une porte d'entrée pour nous. Il nous a aidés à créer ces liens-là avec une scène qui est beaucoup plus large que la scène locale.»

 

Anne Cormier, directrice de l'École d'architecture de l'Université de Montréal, se réjouit elle aussi de la présence à Montréal d'architectes, de professeurs et de chercheurs étrangers. «C'est extrêmement stimulant pour les chercheurs, les enseignants, les étudiants et les professionnels [d'ici].»

 

Selon Mme Cormier, le CCA est «un centre d'une importance intellectuelle très appréciable. Il y a un fonds d'archives qui présente un intérêt international certain et une librairie qui est extrêmement bien garnie», ajoute-t-elle.

 

La directrice de l'École d'architecture de l'Université de Montréal souligne par ailleurs que le CCA organise, en collaboration avec des universités, des charrettes interuniversitaires, un genre de miniconcours de design et d'aménagement pour les étudiants et les diplômés récents. Elle indique également que l'École d'architecture de l'Université de Montréal bénéficie d'un don de Mme Lambert pour organiser chaque année un séminaire international. «Il y a le noyau du CCA, mais il y a aussi des effets qui se répercutent dans d'autres établissements.»

 

Expositions

 

Le CCA a en outre présenté de nombreuses expositions au fil des ans, dont Le Panthéon: Symbole des révolutions, en 1989, Frank Lloyd Wright: Inventer un paysage américain, 1922-1932, en 1996, et Herzog & de Meuron: Archéologie de l'imaginaire, en 2002 et 2003.

 

Il a également invité des architectes montréalais à exposer à l'intérieur de ses murs. L'Atelier Big City, fondé par Anne Cormier, Randy Cohen et Howard Davies, y a par exemple présenté une installation en 1998. «On est plusieurs de ma génération à avoir commencé à vouloir se démarquer en architecture à peu près au moment où le CCA se construisait, et le fait d'avoir été invités à y exposer a certainement été très important», affirme Mme Cormier. L'Atelier Big City a aussi participé à l'exposition Laboratoires, en 2002.

 

La firme Saucier + Perrotte Architectes a pour sa part présenté l'installation Les Lieux de la couleur, en 2000, au CCA. Gilles Saucier a également conçu le design de l'exposition 1973: Désolé, plus d'essence, à l'affiche de novembre 2007 à avril 2008. Il affirme que cela a permis à Saucier + Perrotte Architectes de voir à quel point «l'expertise du CCA est immense, autant en ce qui concerne la conservation que la création et le montage d'expositions de calibre international».

 

Faire école

 

Interrogé sur les expositions marquantes du CCA, Gilles Saucier cite notamment celle consacrée en 2008 aux perspectives de vie à Londres et à Tokyo qu'ont imaginées Stephen Taylor et Ryue Nishizawa. L'exposition comprenait des maquettes et des photographies de maisons. «Je trouvais que ça pouvait véritablement faire école dans une ville comme Montréal, qui est en mal de se renouveler sur le plan de la création de l'habitation, entre autres», dit Gilles Saucier, ajoutant que l'exposition pouvait donner une perception de l'habitation qui est différente de celle qu'on a tendance à avoir spontanément. «Des gens qui ne sont pas du tout en architecture m'ont dit que c'était vraiment intéressant de voir à quel point ça pouvait aller beaucoup plus loin que ce qu'on a actuellement comme développement de la ville. Donc, à ce moment-là, le CCA contribue de façon très directe à montrer aux gens les possibles de l'architecture.»

 

Anne Cormier croit pour sa part que le CCA a eu un effet sur la perception que le grand public a de l'architecture. «Déjà, simplement de savoir qu'il y a des expositions sur l'architecture, on pense à l'architecture différemment. On pense effectivement qu'il y a de l'architecture, alors que peut-être autrement on n'y pense pas particulièrement», dit Mme Cormier, soulignant le travail de vulgarisation et de sensibilisation du Centre canadien d'architecture.

 

Bruce Kuwabara estime que les expositions présentées récemment au CCA sont susceptibles d'intéresser un large public: «Il y était question de la perception de la ville et des façons dont les individus peuvent façonner l'environnement urbain.» Plusieurs expositions ont ainsi reflété des préoccupations urbaines, sociales et écologiques, dont Gilles Clément/Philippe Rahm - Environnement: manières d'agir pour demain et Actions: comment s'approprier la ville. M. Kuwabara invite les gens à ne pas tenir le CCA pour acquis, à le fréquenter et à le soutenir.

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247338.html (26/4/2009 11H20)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Grandir ou agrandir - L'expansion sera bien réelle, mais virtuelle

 

Le Devoir

Martine Letarte

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Expansion, Centre canadien d'architecture, Internet, Culture, Montréal, Canada (Pays)

 

« On fera du développement interactif »

Le Centre canadien d'architecture (CCA) souhaite continuellement se développer et attirer de nouveaux publics. Or il y a des limites physiques au développement de l'établissement. De plus, une bonne partie de la clientèle que le CCA pourrait intéresser à travers le monde ne peut pas toujours se rendre à Montréal pour faire une visite physique des lieux. La solution mise de l'avant? Internet.

 

«Bien sûr, nous essayons de rendre le CCA plus accessible à la population. Nous avons notamment décidé dernièrement de permettre aux enfants et aux étudiants de visiter gratuitement le musée et nous avons étendu les heures d'ouverture. Mais nous voulons faire beaucoup plus», affirme Mirko Zardini, directeur et conservateur en chef du CCA.

 

Ainsi, pour rejoindre la population de façon beaucoup plus large, la direction du CCA a choisi d'explorer les multiples possibilités du cyberespace. C'est à la boîte Bluesponge que l'équipe du CCA a confié la refonte de son site Internet.

 

«En fait, pour ce projet d'envergure, le terme "site Internet" est un peu réducteur», indique Fady Atallah, cofondateur et président de Bluesponge.

 

On parle donc plutôt de CCA en ligne, un projet en développement depuis plus d'un an. «La direction de l'établissement voulait vraiment un deuxième CCA grâce à Internet. Le but, ce n'est pas seulement de donner de l'information sur le CCA, mais de lui permettre de participer au débat public dans Internet, pour se faire entendre par une clientèle encore plus grande», explique le concepteur.

 

Un projet d'envergure

 

Le défi était de taille pour Bluesponge, parce que le CCA, c'est une centaine d'expositions, 100 000 dessins et estampes, 55 000 photographies, près de 200 000 périodiques, 70 publications que le Centre a fait paraître depuis son ouverture et de nombreuses conférences. Chaque année, le CCA accueille aussi une quarantaine de chercheurs dont le travail est susceptible d'intéresser les professionnels, les chercheurs et les étudiants dans les quatre coins du monde.

 

«Le défi, c'est de tout lier ces éléments de façon à ce que la navigation sur le site soit simple et intuitive pour les usagers», affirme M. Atallah, dont la firme s'est fait remarquer pour la convivialité du site http://www.madeinmtl.com qu'elle a imaginé pour les gens qui souhaitent se faire créer des parcours dans l'univers montréalais en fonction de leurs intérêts.

 

Le CCA en ligne se veut donc un site facile à utiliser et comprendra différents outils et sections. «Chaque exposition aura sa page et on retrouvera toujours des liens vers des contenus reliés, de façon à proposer un parcours de navigation au visiteur, à l'amener à faire des découvertes», indique M. Atallah.

 

«Ce sera un peu comme YouTube, précise Mirko Zardini. On cherche quelque chose, on le trouve et ensuite on se fait proposer d'autres choses qui sont reliées.»

 

Le CCA en ligne comprendra aussi les données classiques sur l'établissement, avec notamment un calendrier qu'on pourra consulter par type d'événements. Le site hébergera aussi un puissant outil de recherche avancé dans les différentes collections et publications appartenant au haut lieu montréalais de l'architecture. «D'ailleurs, le CCA a une bonne base de données des différents objets de ses collections, mais des gens travaillent maintenant à l'enrichir et à rendre l'information plus compréhensible et plus significative pour le grand public», affirme Fady Atallah.

 

En fait, c'est tout le design du CCA en ligne qui a été développé en fonction des usagers plutôt que de l'organisation elle-même. «Nous avons fait beaucoup de travail avant de commencer à développer le projet. Nous sommes allés questionner les différentes clientèles, soit le grand public, les professionnels et les chercheurs, pour mieux connaître leurs besoins», ajoute-t-il.

 

De réelles utilités

 

Le CCA en ligne est évidemment un important investissement pour l'établissement, mais la direction espère qu'Internet deviendra une nouvelle forme d'archives qui seront accessibles à tous les gens intéressés à l'architecture. Le jeu en vaut donc la chandelle.

 

«Par exemple, un étudiant d'Hong Kong qui s'intéresse aux toits verts pourra aller dans le CCA en ligne pour découvrir le travail de Gilles Clément présenté chez nous en 2006 et d'autres contenus pertinents», se réjouit M. Zardini.

 

Comme le CCA collabore continuellement avec différents établissements et écoles situés aux quatre coins du monde, Internet sera également un moyen de favoriser les discussions et les échanges, affirme M. Zardini.

 

«Ce n'est pas rare que nous collaborions avec des gens de Harvard, de Princeton ou du MIT, explique-t-il. Par exemple, pour notre exposition La Vitesse et ses limites qui sera bientôt à l'affiche, le commissaire est Jeffrey Schnapp, du Stanford Humanities Lab, et l'exposition est présentée en collaboration avec la Wolfsonian-Florida International University de Miami. Le CCA en ligne facilitera grandement notre collaboration avec nos partenaires et créera de véritables réseaux en ligne.»

 

Bluesponge doit ainsi livrer en mai une première version du CCA en ligne. Ensuite, si tout va bien, les internautes pourraient aller y naviguer dès l'été. «Mais tout ne sera pas mis en ligne d'un coup. Le site prendra de l'ampleur avec le temps», affirme Mirko Zardini.

 

«On s'ajustera aussi en fonction des commentaires des usagers et des sections du site les plus utilisées. On fera en fait du développement interactif», ajoute M. Atallah.

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247337.html (26/4/2009 11H22)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Corporations - « Mon musée préféré »

 

Le Devoir

Claude Lafleur

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Corporations, Centre canadien d'architecture, Culture, Musée, Montréal, Canada (Pays)

 

Un établissement dont ne saurait se passer Montréal

On les dit gens d'affaires. Et on les retrouve au Centre canadien d'architecture (CCA). Le milieu corporatif s'associe au CCA, cet «actif que possède Montréal et qui procure à notre société un rayonnement extraordinaire».

 

«Le Centre canadien d'architecture -- mon musée préféré! -- est un joyau que possède Montréal et qu'il faut absolument préserver», lance avec enthousiasme Me Pierre-André Themens, membre du comité de direction du cabinet Davis Ward Philips Vineberg.

 

«Nous appuyons le CCA depuis ses débuts parce que nous croyons qu'il s'agit d'un établissement remarquable dont Montréal ne saurait se passer», renchérit Claude Lussier, conseiller principal aux communications à la banque RBC.

 

«Hydro-Québec est un partenaire des premières heures du CCA, indique Marie-José Nadeau, vice-présidente exécutive aux affaires corporatives de la société d'État. Connaissant Mme Lambert comme visionnaire, pour ses qualités personnelles et pour sa rigueur, lorsqu'elle a invité Hydro-Québec à devenir partenaire du CCA, il y a presque vingt ans, on y a vu l'occasion de soutenir ce qui allait devenir l'un des grands établissements montréalais.»

 

Alors que Me Themens est associé à l'aventure de Phyllis Lambert en tant que vice-président du conseil des fiduciaires du CCA depuis 1980, la banque RBC appuie financièrement l'établissement depuis 25 ans.

 

Comme l'explique Me Themens, le Centre canadien d'architecture est à la fois un musée exceptionnel, un établissement de formation, un centre de conservation et un attrait pour Montréal sur la scène internationale. «Il s'agit d'un établissement de calibre international, dit-il. Des gens de partout viennent y travailler. Et si vous parlez du CCA n'importe où dans le monde de l'architecture, c'est sûr que tout le monde sait de quoi il s'agit. C'est, de plus, un centre de recherche qui permet à nos étudiants de se former ici... Le CCA, c'est absolument extraordinaire!»

 

«Pourquoi soutenir le CCA?, poursuit Claude Lussier. Parce qu'il s'agit d'un établissement unique, d'un actif que possède Montréal et qui procure à notre société un rayonnement extraordinaire. Pour nous, à RBC, le fait d'appuyer un tel projet revient à contribuer à la vie communautaire de Montréal, ce qui est très important pour nous.»

 

Une créature difficile à financer

 

Autant Me Themens que M. Lussier et Mme Nadeau constatent qu'il demeure difficile de financer adéquatement un établissement comme le CCA. Alors que les représentants de RBC et d'Hydro-Québec confirment qu'ils sont sollicités de toutes parts «par tant d'oeuvres qui le méritent tout autant», Me Themens constate que, n'eût été du soutien financier incessant de Phyllis Lambert, non seulement le CCA n'aurait jamais vu le jour, mais il aurait péri depuis belle lurette. «C'est un secret de Polichinelle, dit-il, que le CCA survit parce que Mme Lambert est indépendante de fortune.»

 

Au départ, il y a eu quelques contributions privées, notamment de Power Corporation, mais l'établissement n'a alors aucunement bénéficié du soutien de l'État. Il a ensuite fallu plusieurs années pour obtenir un financement récurrent, et partiel, du gouvernement du Québec. Il reçoit maintenant chaque année un financement récurrent qui représente un peu moins de 20 % de son budget de fonctionnement, et le reste doit venir de fonds privés.

 

Heureusement que des sociétés comme RBC et Hydro-Québec lui procurent un soutient constant. C'est ainsi que la banque apporte bon an mal an environ 30 000 $ au budget de fonctionnement du CCA. Quant à la société d'État, elle fournit de 60 000 $ à 75 000 $ par année en finançant des projets spécifiques. «Depuis vingt ans, chaque année, nous sommes au rendez-vous soit d'une exposition, soit d'un partenariat en développement», précise Mme Nadeau.

 

Elle ajoute qu'Hydro-Québec soutient le CCA entre autres parce que la société d'État tient à encourager la conservation du patrimoine montréalais. «Nous logeons nous-mêmes dans un édifice qui correspond aux caractéristiques du début des années 1960, dit-elle. Le CCA représente pour nous une source de fierté et d'encouragement à l'excellence et à la conservation de notre patrimoine.»

 

Tirer avantage du CCA

 

Le Centre canadien d'architecture est bénéfique de plusieurs façons pour la société québécoise, insiste Me Themens. «Nos expositions permettent de montrer ce qui s'est fait par le passé et ce qui se fait ailleurs», dit-il. L'une d'elles -- Le Montréal des années 1960 -- lui sert même personnellement: «Le catalogue de cette exposition me permet de montrer à mes enfants (de jeunes adultes) ce qu'était Montréal lorsque j'avais leur âge et ce qu'on pensait qu'elle deviendrait. Par exemple, rappelle-t-il, dans les années 1960, on se disait qu'en l'an 2000 Montréal compterait 15 millions d'habitants! Cette exposition m'a permis de leur expliquer certaines décisions qui ont été prises à l'époque... Le CCA permet donc de faire des réflexions et de comprendre les choix qui ont été faits.»

 

Pour sa part, Marie-José Nadeau souligne qu'Hydro-Québec apprécie le CCA parce que, entre autres, il stimule la relève en architecture. «Il y a quelques années, dit-elle, le Centre canadien d'architecture a mis sur pied un concours destiné à intéresser les jeunes architectes. Or, lorsque nous avons eu besoin d'en recruter un pour nous aider à installer le buste de René Lévesque (à l'angle du boulevard René-Lévesque et de la rue Saint-Urbain), nous avons fait appel à l'une des lauréates du CCA: Sophie Charlevoix.»

 

«Pour nous, le CCA représente un actif unique, enchaîne Claude Lussier. D'une part, il y a l'extraordinaire patrimoine documentaire qu'a assemblé Mme Lambert et qui attire ici les chercheurs et les étudiants du monde. C'est un véritable trésor pour la ville. D'autre part, le CCA donne un accès facile et, surtout, particulièrement intéressant au grand public, ce qui permet à tous de se familiariser avec l'architecture.» Incidemment, M. Lussier parle en toute connaissance de cause puisque, avant de s'occuper de la contribution de RBC au CCA, il était lui-même un visiteur régulier du musée. «En fréquentant le CCA, conclut-il, on prend conscience de l'importance de l'architecture dans la vie d'une métropole comme la nôtre et dans notre vie personnelle. Et ça, c'est important!»

 

***

 

Collaborateur du Devoir

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247339.html (26/4/2009 11H23)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Au Centre d'étude du CCA - « C'est un privilège de faire de la recherche ici »

 

Le Devoir

Assia Kettani

Édition du samedi 25 et du dimanche 26 avril 2009

 

Mots clés : Bibliothèque, Centre d'étude, Centre canadien d'architecture, Culture, Canada (Pays), Montréal

 

Les boursiers Mellon ont les ressources du centre à leur disposition

 

rot_xz_250409.jpg

Vue du hall d'entrée du CCA depuis la rotonde ouest

 

Inauguré en septembre 1997, le Centre d'étude du Centre canadien d'architecture (CCA) est un institut international consacré à la recherche sur l'histoire et la théorie de l'architecture. Le centre met l'ensemble des collections et de la bibliothèque du CCA à la disposition des chercheurs, des étudiants, des architectes et d'autres professionnels venus poursuivre leurs travaux de recherche.

 

Dans le cadre d'un programme d'accueil, un comité consultatif composé de consultants externes et de membres du CCA sélectionne chaque année une dizaine de chercheurs en résidence, qui viennent faire des séjours de un à huit mois pour développer leurs projets. Soutenu par la Fondation Andrew-Mellon, le centre accueille également chaque année, durant plusieurs mois, d'éminents chercheurs de renommée internationale qui se joignent à lui en qualité de chercheurs principaux et boursiers Mellon. Depuis sa création, le centre a ainsi accueilli plus d'une centaine de spécialistes issus d'une vingtaine de pays, 16 chercheurs principaux et plus de 80 chercheurs étudiants canadiens et américains.

 

Ressources

 

Ayant à leur disposition la bibliothèque et l'ensemble de la collection du CCA, les chercheurs peuvent ainsi tirer parti de ressources d'une richesse exceptionnelle. En effet, la collection du CCA est l'une des plus importantes du monde, réunissant publications, dessins, plans, maquettes, gravures, études conceptuelles, photographies, archives, documents divers ainsi que récits oraux d'architectes. En tout, quelque

 

100 000 dessins et estampes,

 

55 000 photographies, 150 archives et près de 200 000 périodiques concernent la culture architecturale à l'échelle mondiale, sur une période allant de la Renaissance à nos jours.

 

Cette collection permet aux chercheurs d'avoir des conditions de travail optimales, qu'apprécient ceux qui ont pu bénéficier d'un séjour au Centre d'étude, tel que Joan Busquets, architecte, professeur en urbanisme et design à l'École de design Harvard et actuellement boursier Mellon au centre d'étude: «C'est un privilège de faire de la recherche ici, à la fois pour la qualité des archives et celle de l'atmosphère de travail.»

 

Pour cet urbaniste catalan, le Centre d'étude offre un cadre intellectuel incomparable, et l'accès à la collection et à une telle banque d'archives permet un travail de fond indispensable pour la recherche en architecture: «Avec une collection d'une telle qualité, non seulement les pistes de recherche sont variées, ce qui donne beaucoup de liberté à la recherche, mais le fait de travailler à partir d'archives permet de comprendre le processus de création, et pas seulement le résultat, ce qui est fondamental en architecture.»

 

Qualité

 

Grâce à ces ressources, le Centre d'étude assure le maintien d'un très haut niveau de recherche: au fil des ans, le centre a donc vu défiler, à titre de boursier Mellon, plusieurs grands noms de l'architecture et de l'histoire de l'art, parmi lesquels figurent Ulrich Keller, James S. Ackerman, Juan Antonio Ramirez, Stephen Bann, Hubert Damisch, Martin Kemp, Joseph Rykwert, Kurt Foster, Anthony Vidler, André Guillerme, Beatriz Colomina, Francis Strauven, Jeffrey Schnapp, Bernardo Secchi et Rebecca Solnit. Pour Joan Busquets, «en architecture, c'est sans doute le centre le plus important du monde».

 

Aux dires de Kurt Foster, professeur à l'École d'architecture Yale et conférencier Mellon en 2006, l'une des plus grandes richesses du centre d'étude est l'ouverture sur un réseau de travail. Invitant les chercheurs à publier les résultats de leurs travaux et à participer à des séminaires et conférences où les travaux en cours font l'objet de discussions, le centre galvanise les intérêts et permet aux chercheurs de profiter d'un contexte d'échanges intellectuels et scientifiques. Selon Kurt Foster, «ce n'est pas un ermitage, dans lequel les chercheurs travaillent de manière isolée et vivent leur aventure intellectuelle personnelle. Les chercheurs travaillent sur leurs projets, se réunissent au centre, se découvrent. Ils se développent mieux et plus rapidement que s'ils étaient tout seuls. C'est très stimulant intellectuellement.»

 

Séminaires

 

En 2009, outre un séminaire intitulé What Goes Up Must Come Down: The Politics of Prairie Grain Elevators et donné en février par David Barney, le Centre d'étude a accueilli le 16 avril une conférence de Joan Busquets sur le thème de la revitalisation de la ville de Barcelone. Cet architecte et urbaniste catalan axe sa recherche sur la création des espaces urbains de demain, pour ne pas refaire les mêmes erreurs que dans le passé et pour concevoir des villes qui seront des espaces de vie agréables, et ce, de manière durable: «Notre mission (architectes et urbanistes) est de créer des espaces pour les citoyens. Les architectes d'aujourd'hui doivent résoudre les questions posées par les villes bâties à la hâte, comme les grands ensembles en France. On a retenu beaucoup de choses de cette expérience, qui n'était pas une réussite.» Pour ces travaux, l'urbaniste catalan dit avoir particulièrement apprécié la richesse de la collection de la deuxième moitié du XXe siècle du Centre d'étude, une période fondamentale pour comprendre le développement des villes.

 

Les deux autres chercheurs principaux de l'année, Mike Davis et Greg Lynn, présenteront également une conférence en 2009. Mike Davis, ethnologue, sociologue, historien et professeur à l'Université de la Californie, s'intéresse à la lutte des classes à travers l'étude des problèmes fonciers de Los Angeles, au développement des bidonvilles et à la militarisation de la vie sociale à travers les mesures sécuritaires. La dernière conférence sera présentée par Greg Lynn, architecte en chef de la firme Greg Lynn FORM, professeur au département d'architecture et de design urbain de l'Université de la Californie à Los Angeles et lauréat de la Biennale de Venise 2008, dont la démarche vise à combiner les réalités de la conception architecturale et de la pratique de l'architecture avec les possibilités expérimentales, spéculatives et théoriques de l'écriture et de l'enseignement.

 

Nécessaire recherche

 

Pour Joan Busquets, le Centre d'étude du CCA est d'autant plus important qu'il permet de pallier l'actuel manque d'investissement dans la recherche en architecture: selon lui, «on n'investit pas assez dans la recherche en architecture. Pourtant, tout le monde s'accorde à dire que c'est important: aujourd'hui, la moitié de la population mondiale vit en ville et, dans 20 ans, on prévoit que ce sera 70 % de la population mondiale. Il faut créer de l'espace dans les villes pour ces 20 % supplémentaires. Les décisions qui doivent être prises concernant les grands projets urbains sont des décisions importantes et les gens qui prennent des décisions pour la ville ont besoin d'avis clairs. Or, sur la ville, c'est là où il y a le moins d'argent pour la recherche.»

 

La qualité du centre et de l'expérience de recherche qu'on y trouve est, selon lui, un atout incomparable pour la ville de Montréal: il considère que «le CCA met Montréal dans une échelle internationale. C'est une condition magnifique pour la ville de Montréal.»

 

***

 

Collaboratrice du Devoir

 

http://www.ledevoir.com/2009/04/25/247336.html (26/4/2009 11H24)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Join the conversation

You can post now and register later. If you have an account, sign in now to post with your account.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Vous avez collé du contenu avec mise en forme.   Supprimer la mise en forme

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   You cannot paste images directly. Upload or insert images from URL.



×
×
  • Créer...