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L'industrie du condo, un monde à connaitre.


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https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1788527/augmentation-frais-coproprietes-fonds-autoassurance-prevoyance

L’augmentation attendue des frais de condo devient réalité

Le Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec estime à 30 000 le nombre de copropriétés au Québec.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Mathieu Dion (accéder à la page de l'auteur)Mathieu Dion

le 28 avril 2021

Vivre en condo coûte de plus en plus cher. L'effet de plusieurs projets de loi adoptés dans les dernières années pour réformer le droit de la copropriété au Québec commence à se faire sentir sur les cotisations mensuelles. Beaucoup l'apprennent à leurs dépens lors des assemblées générales annuelles qui se tiennent présentement.

Et ce n’est qu’un début, surtout dans les copropriétés vieillissantes.

Depuis l’année dernière, les copropriétés ont l’obligation de se constituer un fonds d'autoassurance d’ici avril 2022. Sa valeur devra atteindre le montant de la plus haute franchise en cas de sinistre (dégât d’eau). Dans certains immeubles, elle peut atteindre 250 000 $. Lorsque le syndicat de copropriété y aura recours pour des réparations, le fonds devra être de nouveau capitalisé.

Cet été, il est en plus attendu que la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation finalise un règlement qui contraindra les copropriétés à mener une étude de fonds de prévoyance et à se conformer à cette analyse sur une période de 10 ans. Les fonds suffisamment renfloués sont l’exception à la règle.

Pour combler le manque à gagner, son ministère prévoit que les charges par copropriétaire devront bondir de 150 $ à 300 $ par année en moyenne. Près d'un ménage sur cinq demeure en condo à Montréal, un sur dix au Québec, selon l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (Association des professionnels de la construction et de l'habitation au QuébecAPCHQ).

De plus en plus difficile de reporter à plus tard

La présidente de SolutionCondo, avec près de 15 000 unités sous gestion, dit observer les augmentations. On a commencé à ramener les contributions des copropriétaires au niveau que va exiger la loi, indique Élise Beauchesne. Les gens qui comprennent qu’il va falloir le renflouer tôt ou tard ont commencé à augmenter leurs contributions. Mais pour plusieurs, ça demeure quand même flou pour le moment.

« Dans les immeubles, on voit beaucoup d'administrateurs vendre leur condo. Ça donne un signal que certaines personnes réalisent que le marché va changer. »

— Une citation de  Élise Beauchesne, PDG, SolutionCondo

Les défenseurs de la réforme insistent sur le fait qu’il s’agit d’un mal nécessaire pour assurer une équité intergénérationnelle dans les immeubles, mais des gestionnaires et des administrateurs s'inquiètent tout de même de la vitesse à laquelle les changements sont imposés.

Simion Matei, de Condovision Gestion immobilière, croit qu’il serait plus sage de les faire d’une manière plus progressive.

Tout ce qui n'a pas été fait en 25 ans, le gouvernement veut le faire cette année ou dans trois ans, déplore-t-il. Il y a littéralement des révolutions dans les immeubles. Les copropriétaires vont mettre les gestionnaires et les administrateurs dehors, mais oublient que, pendant les 20 dernières années, ils n’ont rien cotisé.

Les copropriétés plus anciennes frappées de tous côtés

Une copropriété lavalloise de 94 unités et de plus d’une trentaine d’années s’apprête à vivre une situation catastrophique. Juste changer les fenêtres, c’est deux millions de dollars, s’exclame la présidente du syndicat, Sylvie Sauriol. Quelques années plus tôt, elles coûtaient 700 000 $ de moins, mais l'explosion du prix des matériaux depuis le début de la pandémie change la donne.

Les nouveaux frais pour les fonds d’autoassurance et de prévoyance s'ajoutent donc aux travaux et mises aux normes inhérents aux plus vieilles constructions. Et elles sont nombreuses, d’après l’Association des professionnels de la construction et de l'habitation au QuébecAPCHQ : la moitié du parc des copropriétés a été construit avant l’an 2000.

Mme Sauriol admet se casser la tête en vue d’annoncer aux résidents la mauvaise nouvelle le mois prochain en assemblée générale. Si on veut se conformer, dit-elle, on parle d’une augmentation de 300 $ par mois. Il va falloir être inventif. Elle craint que certains d’entre eux ne soient pas en mesure d’assumer les cotisations supplémentaires, de quoi les forcer à vendre leur condo.

« Pour beaucoup de copropriétaires, pour ceux qui n’étaient pas habitués, ils ont le sentiment de devoir tout supporter d’une traite. C’est pour ça qu’il faut les accompagner le plus possible. »

— Une citation de  Paul Rodrigues, président, Galilehos

Pédagogie et planification

Un effort de pédagogie et de planification s'impose dans ce contexte, aux dires du président de Galilehos, Paul Rodrigues, qui offre également des services de gestion. Cet effort sera d’autant plus grand au sein des petites et moyennes copropriétés, majoritairement sans gestionnaire pour les conseiller.

Élise Beauchesne, de SolutionCondo, souligne à ce sujet que les petites copropriétés sont soumises aux mêmes règles, mais avec un plus faible nombre de gens pour assumer les dépenses.

Les prix pour mener les études de fonds de prévoyance sont d’ailleurs appelés à augmenter eux aussi avec l'afflux de demandes pour la trentaine de firmes spécialisées dans ce créneau.

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Il y a 14 heures, acpnc a dit :

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1788527/augmentation-frais-coproprietes-fonds-autoassurance-prevoyance

L’augmentation attendue des frais de condo devient réalité

Le Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec estime à 30 000 le nombre de copropriétés au Québec.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Mathieu Dion (accéder à la page de l'auteur)Mathieu Dion

le 28 avril 2021

Vivre en condo coûte de plus en plus cher. L'effet de plusieurs projets de loi adoptés dans les dernières années pour réformer le droit de la copropriété au Québec commence à se faire sentir sur les cotisations mensuelles. Beaucoup l'apprennent à leurs dépens lors des assemblées générales annuelles qui se tiennent présentement.

Et ce n’est qu’un début, surtout dans les copropriétés vieillissantes.

Depuis l’année dernière, les copropriétés ont l’obligation de se constituer un fonds d'autoassurance d’ici avril 2022. Sa valeur devra atteindre le montant de la plus haute franchise en cas de sinistre (dégât d’eau). Dans certains immeubles, elle peut atteindre 250 000 $. Lorsque le syndicat de copropriété y aura recours pour des réparations, le fonds devra être de nouveau capitalisé.

Cet été, il est en plus attendu que la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation finalise un règlement qui contraindra les copropriétés à mener une étude de fonds de prévoyance et à se conformer à cette analyse sur une période de 10 ans. Les fonds suffisamment renfloués sont l’exception à la règle.

Pour combler le manque à gagner, son ministère prévoit que les charges par copropriétaire devront bondir de 150 $ à 300 $ par année en moyenne. Près d'un ménage sur cinq demeure en condo à Montréal, un sur dix au Québec, selon l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (Association des professionnels de la construction et de l'habitation au QuébecAPCHQ).

De plus en plus difficile de reporter à plus tard

La présidente de SolutionCondo, avec près de 15 000 unités sous gestion, dit observer les augmentations. On a commencé à ramener les contributions des copropriétaires au niveau que va exiger la loi, indique Élise Beauchesne. Les gens qui comprennent qu’il va falloir le renflouer tôt ou tard ont commencé à augmenter leurs contributions. Mais pour plusieurs, ça demeure quand même flou pour le moment.

« Dans les immeubles, on voit beaucoup d'administrateurs vendre leur condo. Ça donne un signal que certaines personnes réalisent que le marché va changer. »

— Une citation de  Élise Beauchesne, PDG, SolutionCondo

Les défenseurs de la réforme insistent sur le fait qu’il s’agit d’un mal nécessaire pour assurer une équité intergénérationnelle dans les immeubles, mais des gestionnaires et des administrateurs s'inquiètent tout de même de la vitesse à laquelle les changements sont imposés.

Simion Matei, de Condovision Gestion immobilière, croit qu’il serait plus sage de les faire d’une manière plus progressive.

Tout ce qui n'a pas été fait en 25 ans, le gouvernement veut le faire cette année ou dans trois ans, déplore-t-il. Il y a littéralement des révolutions dans les immeubles. Les copropriétaires vont mettre les gestionnaires et les administrateurs dehors, mais oublient que, pendant les 20 dernières années, ils n’ont rien cotisé.

Les copropriétés plus anciennes frappées de tous côtés

Une copropriété lavalloise de 94 unités et de plus d’une trentaine d’années s’apprête à vivre une situation catastrophique. Juste changer les fenêtres, c’est deux millions de dollars, s’exclame la présidente du syndicat, Sylvie Sauriol. Quelques années plus tôt, elles coûtaient 700 000 $ de moins, mais l'explosion du prix des matériaux depuis le début de la pandémie change la donne.

Les nouveaux frais pour les fonds d’autoassurance et de prévoyance s'ajoutent donc aux travaux et mises aux normes inhérents aux plus vieilles constructions. Et elles sont nombreuses, d’après l’Association des professionnels de la construction et de l'habitation au QuébecAPCHQ : la moitié du parc des copropriétés a été construit avant l’an 2000.

Mme Sauriol admet se casser la tête en vue d’annoncer aux résidents la mauvaise nouvelle le mois prochain en assemblée générale. Si on veut se conformer, dit-elle, on parle d’une augmentation de 300 $ par mois. Il va falloir être inventif. Elle craint que certains d’entre eux ne soient pas en mesure d’assumer les cotisations supplémentaires, de quoi les forcer à vendre leur condo.

« Pour beaucoup de copropriétaires, pour ceux qui n’étaient pas habitués, ils ont le sentiment de devoir tout supporter d’une traite. C’est pour ça qu’il faut les accompagner le plus possible. »

— Une citation de  Paul Rodrigues, président, Galilehos

Pédagogie et planification

Un effort de pédagogie et de planification s'impose dans ce contexte, aux dires du président de Galilehos, Paul Rodrigues, qui offre également des services de gestion. Cet effort sera d’autant plus grand au sein des petites et moyennes copropriétés, majoritairement sans gestionnaire pour les conseiller.

Élise Beauchesne, de SolutionCondo, souligne à ce sujet que les petites copropriétés sont soumises aux mêmes règles, mais avec un plus faible nombre de gens pour assumer les dépenses.

Les prix pour mener les études de fonds de prévoyance sont d’ailleurs appelés à augmenter eux aussi avec l'afflux de demandes pour la trentaine de firmes spécialisées dans ce créneau.

En coup de vent, deux remarques: 

1) Les nouveaux acheteurs devraient se méfier des vieux immeubles à condos et de ceux de piètre qualité: les prix demandés sont certes moins élevés, mais peut-être pas suffisamment pour compenser leurs déficiences qui ne tarderont pas à se manifester.

2) Dans le but d'amoindrir le choc d'une augmentation brutale des frais de condos, une partie de l'augmentation pourrait être "puisée" à partir de l'ajout d'une hypothèque dont le remboursement serait dû au moment de la vente future.  Ceci pourrait surtout s'appliquer dans les cas où la valeur marchande actuelle de l'unité dépasse largement le prix d'acquisition et l'hypothèque qui y est attachée (qui peut même avoir été remboursée intégralement).  Une formule semblable existe en France pour amoindrir le choc d'une hausse des taxes foncières résultant de l'appréciation de la propriété: l'actuel propriétaire a des revenus modestes, mais sa propriété a une grande valeur; il peut continuer à y habiter à peu de frais, jusqu'à la vente de la propriété; à ce moment, les taxes supplémentaires qui n'avaient pas été payées sont déduites du produit de la vente.  La création d'un "produit financier" facilitant ce genre de transactions devrait être envisagée.     

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À l'Ile des Soeurs, certains vieux immeubles comme "Les Verrières" qui ont maintenant 40 ans vont chercher près de 1000$/mois de frais de condo pour un 2 chambres à coucher. Et y'a des lumières (plutôt des veilleuses) qui sont prêt à payer ça, pour du vieux stock avec des armoires en mélamine et du tapis mur à mur! Pas pour rien que Les Verrières sont rendus un hospice pour vieillards fortunés. Bref, il est clair que la survie du "condo" dans les grosses tours est intenable à long terme. Imaginez les frais de condo au Victoria sur le Parc dans 40 ans!!! 

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Il y a 12 heures, Rocco a dit :

À l'Ile des Soeurs, certains vieux immeubles comme "Les Verrières" qui ont maintenant 40 ans vont chercher près de 1000$/mois de frais de condo pour un 2 chambres à coucher. Et y'a des lumières (plutôt des veilleuses) qui sont prêt à payer ça, pour du vieux stock avec des armoires en mélamine et du tapis mur à mur! Pas pour rien que Les Verrières sont rendus un hospice pour vieillards fortunés. Bref, il est clair que la survie du "condo" dans les grosses tours est intenable à long terme. Imaginez les frais de condo au Victoria sur le Parc dans 40 ans!!! 

C'est vrai que les condos vieillissants peuvent parfois réserver de mauvaises surprises avec des frais qui peuvent exploser avec le temps. Mais s'ils sont bien entretenus comme la majorité, ils ne devraient pas perdre de leur valeur, car aucun propriétaire n'a intérêt à négliger son bien, pas plus que les syndicats de propriété. De toute façon il y a plein de grands d'immeubles d'une autre époque (particulièrement à New-York) qui ont très bien traversé le temps et demeurent des valeurs sûres très prisés à cause notamment de leur excellente localisation.

Bien sûr rénover des tours de grande hauteur, surtout l'extérieur, peut paraitre prohibitif même partagé par des centaines d'occupants. Mais ce ne devrait être que de rares exception qui posent vraiment problème pour cause de vice de construction ou de matériaux de moins bonne qualité. À ce propos les codes du bâtiment ont dû faire leur travail, en s'assurant de la durabilité des constructions et de leur sécurité à long terme. 

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il y a 10 minutes, Né entre les rapides a dit :

J'aimerais qu'une discussion se poursuive sur le sujet des moyens d'amoindrir (amortir)  le choc des hausses brutales des frais de condos (point 2 dans mon dernier message).  Ça concerne immédiatement beaucoup de monde. 

Assez simple en pratique, difficile en réalité. Il faut des frais de condos "élevés" ou "bien ajustés" dès la première année de gestion de n'importe quelle nouvelle copropriété. Actuellement ils débutent toujours très bas car le promoteur fait miroiter des frais de condos raisonnables quand il vend ses unités. Et pour les copropriétés déjà construites depuis un certain temps il n'y a pas cent solutions. Soit une cotisation spéciale ou une hausse drastique immédiate. Je connais plusieurs qui ont eu des cotisations de 3k par année pendant 5 ans juste pour pas hausser brutalement les frais de condos pour ne pas dévaluer la valeur des unités de l'édifice. Triste spectacle. Encore là, quand tu donnes le pouvoir à des nobodys en mal d'attention de participer au CA de leur condo sur la simple base d'une élection à main levée à 10h du soir dans une AGA, ça donne le roman-savon du REM de l'Est à la grandeur des copropriétés du Québec.

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il y a 12 minutes, Rocco a dit :

Et pour les copropriétés déjà construites depuis un certain temps il n'y a pas cent solutions. Soit une cotisation spéciale ou une hausse drastique immédiate.

Vrai que des dépenses majeures d'entretien/réparation doivent être faites en urgence.  Tu mentionnes deux solutions couramment employées pour assumer ces dépenses.  J'en ai suggéré une autre, qui ne ferait pas disparaître par magie les coûts devant être assumés, mais qui en réduirait le choc pour les propriétaires existants.  Elle n'entraînerait pas une baisse de la valeur marchande, mais elle diminuerait le produit net de la vente (future).  A ma connaissance, on n'a pas (encore) recours à cette méthode au Québec (notamment), mais je ne vois pas ce qui l'empêcherait, à condition de créer un produit financier adapté.

Evidemment, ça n'élimine nullement la nécessité d'un meilleur encadrement de la gestion des condos, y compris l'exigence d'inclure dès le début des frais commensurables avec les besoins prévisibles d'entretien/réparation.         

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  • 8 mois plus tard...

Tensions linguistiques dans les tours de condos

 

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Immeubles de condos au centre-ville de Montréal

L’explosion des tours résidentielles a des répercussions linguistiques, surtout au centre-ville de Montréal. Quelle langue utiliser dans les documents, les assemblées, les ascenseurs ?

Publié à 5h00

https://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/2022-10-24/tensions-linguistiques-dans-les-tours-de-condos.php

Suzanne Colpron La Presse

Lorsqu’il a pris possession de son condo, il y a huit ans, M. Serge ne pensait pas devoir se battre pour parler français. Mais la situation s’est à ce point envenimée qu’il s’est résolu à intenter une poursuite en dommages contre les administrateurs de sa copropriété.

« Je les poursuis parce qu’ils m’ont dit carrément que je n’avais pas le droit d’être un Québécois au Québec, lance-t-il. Ils veulent que tout soit dans la langue anglaise. J’ai refusé, moi. Et j’ai simplement dit que j’avais le droit de m’exprimer en français au Québec. »

L’entrée en vigueur en juin de la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, souvent appelée « loi 96 », change la donne. « Ils commencent à comprendre qu’ils ont moins de liberté dans l’imposition de leur volonté », laisse-t-il tomber.

Le cas de M. Serge, qui préfère taire son nom de famille, est extrême, mais il illustre les défis de l’aménagement linguistique dans la vie en condo. Celle-ci soulève des problèmes particuliers, qui ont pris de l’ampleur avec l’explosion de la construction de tours en copropriété au centre-ville de Montréal.

Un chez-soi

L’enjeu peut se résumer ainsi : un condo, est-ce que c’est un chez-soi où on peut parler la langue de son choix, un espace public où, en principe, la langue commune est le français, ou encore un endroit semi-privé, semi-commercial où s’appliqueraient, par exemple, les règles d’affichage ?

Ces questions se posent de façon très concrète lorsqu’il faut déterminer quelle langue est utilisée dans les assemblées de copropriétaires.

 

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Me Yves Joli-Coeur, président du Regroupement des gestionnaires et des copropriétaires du Québec

Me Yves Joli-Cœur, président du Regroupement des gestionnaires et des copropriétaires du Québec, est un expert dans le domaine. « La question de la dualité linguistique dans les assemblées de copropriétaires, c’est une réalité très montréalaise, dit-il. À Québec, ce ne sera pas un enjeu, ni à Chicoutimi. Mais c’est sûr qu’à Montréal, dans une ville très multiethnique, on a cette réalité de la langue, et ce n’est pas juste entre le français et l’anglais, mais également entre les membres de la communauté chinoise qui sont propriétaires, dans les grandes tours du centre-ville, de nombreux appartements. »

Il fait remarquer qu’une copropriété est un milieu collectif, « un milieu de partage d’un actif ».

« Si les gens ne comprennent pas sur quoi ils votent et sur quoi ils ont à partager, c’est évident qu’il va y avoir un autre problème. Il ne faut pas être des intégristes linguistiques, mais il faut avoir à cœur la protection de la langue française. »

L’irréductible francophone

Me Ludovic Le Draoullec, aussi spécialisé en droit de la copropriété, préside des assemblées de copropriétaires depuis 10 ans.

« On se retrouve parfois dans des copropriétés où tu sens que tu vas pouvoir faire l’assemblée uniquement en anglais. Mais, du fait de la loi de la charte française, on se doit quand même de poser la question au début, explique-t-il. Et là, tu vas toujours, comme dans la série Astérix, avoir l’irréductible francophone qui comprend l’anglais, mais qui va dire : “Moi, je ne suis pas d’accord.” Donc, là, on se retrouve obligés de tenir l’assemblée dans les deux langues. »

 

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Me Ludovic Le Draoullec, avocat spécialisé en droit de la copropriété au cabinet De Grandpré Jolicoeur

Ces situations rappellent qu’il faut regarder les deux côtés de la médaille. Les francophones, dans leur souci d’affirmer la place de leur langue, pourront s’appuyer sur les lois linguistiques. Les anglophones, de leur côté, qu’ils soient ou non d’accord avec les lois linguistiques, voudront pouvoir vivre dans leur langue, que ce soit dans leur quartier ou dans leur résidence en copropriété.

Claude Deschênes, ex-journaliste de Radio-Canada, croit de son côté qu’il faut défendre la présence du français.

« Il ne faut pas baisser la garde, affirme-t-il. Il faut parler français à ceux qui sont là. On a ce rôle-là. »

 

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Claude Deschênes, ex-journaliste de Radio-Canada

Il y a un peu plus de deux ans, M. Deschênes a quitté la copropriété qu’il possédait depuis 30 ans, au coin de la rue Sherbrooke et du boulevard Saint-Laurent, pour aller habiter dans une tour de 20 étages au centre-ville, dans un secteur plus anglophone.

Toutes les communications internes sont dans les deux langues, mais la priorité est accordée au français, indique-t-il. Les assemblées annuelles se déroulent aussi en français, avec traduction simultanée dans une salle attenante. Toutefois, sur la page Facebook des résidants de la copropriété, « les gens s’interpellent entre eux en anglais, énormément », constate M. Deschênes.

Je suis surpris. Mais je suis surpris aussi de constater à quel point tout ce monde-là parle français.

Claude Deschênes, à propos des résidants de sa copropriété

« La question, c’est : est-ce qu’on sera assez nombreux comme francophones pour leur faire réaliser que c’est important de parler français ? enchaîne-t-il. Comme la majorité parle anglais, parce que c’est plus simple, ils vont apprendre l’anglais. On se plaint que ça ne parle plus français à Montréal, mais c’est parce que les francophones ne sont pas là ; ils quittent Montréal. C’est ça qui m’inquiète le plus. »

Un clivage

Le politicologue de l’Université Laval Éric Montigny, qui possède aussi un condo à Montréal, partage ces préoccupations.

« Il y a beaucoup de tensions linguistiques dans les réunions annuelles de copropriété, signale-t-il. Le premier enjeu, c’est la langue dans laquelle la réunion doit se dérouler. C’est un enjeu de frustration et de débats. On a même changé d’administrateur de l’édifice parce que des gens se plaignaient qu’il n’y avait pas assez d’anglais. Un autre enjeu important, c’est la longueur des réunions parce qu’elles sont bilingues. Donc, les réunions sont deux fois plus longues. »

La population de sa copropriété est composée à moitié de francophones et à moitié d’anglophones.

Il y a un clivage : des anglophones qui ne parlent pas du tout français veulent être servis en anglais. Il y a des enjeux d’affichage aussi à l’intérieur. Des francophones demandent qu’il y ait une prépondérance de l’affichage en français.

Éric Montigny, politicologue

Il ajoute : « Dans les condos, il y a des espaces privés et des espaces communs. Est-ce qu’on doit étendre la portée de la loi aux aires communes pour le vivre-ensemble et la prépondérance du français ? Moi, je pense que oui. Les gens font ce qu’ils veulent dans leur appartement, mais un espace commun, c’est un espace commun, et la langue commune, c’est le français. »

 

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

La construction de tours en copropriété explose dans le centre-ville de Montréal.

Ce que dit la loi

Quelles sont les règles qui s’appliquent dans les condos ?

La langue des documents

Depuis l’entrée en vigueur de la loi 96, tous les documents tenus à la disposition des copropriétaires doivent être en français. « On ne peut plus rien publier en anglais au registre foncier », précise Me Ludovic Le Draoullec, spécialisé en droit de la copropriété. « Les déclarations de copropriété ne peuvent plus être publiées en anglais, seulement en français. Ça, ça peut être une source de tensions. »

Les amendes en cas de violation vont de 700 $ à 7000 $ pour les personnes et de 3000 $ à 30 000 $ pour les personnes morales (par exemple, une entreprise, un syndicat de copropriétaires), ajoute Me Yves Joli-Cœur, avocat expert en copropriété.

La langue des assemblées

Toute personne a le droit de s’exprimer en français en assemblée délibérante. « Il existe un droit linguistique fondamental au Québec qui est celui de s’exprimer en français dans les assemblées délibérantes », affirme Guillaume Rousseau, professeur agrégé de droit à l’Université de Sherbrooke, directeur des programmes de droit et politique de l’État.

 

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Guillaume Rousseau, professeur agrégé de droit
à l’Université de Sherbrooke

« Le président d’une assemblée de copropriétaires ne pourrait pas dire : “veuillez parler en anglais parce qu’il y a des gens qui ne comprennent pas le français”. Non. C’est un droit fondamental de s’exprimer en français, ajoute-t-il. En matière de droit fondamental, on ne peut pas renoncer à un droit fondamental. On peut renoncer à son exercice. Quelqu’un pourrait dire : “j’ai le droit de parler en français, mais je décide de ne pas exercer ce droit”. Mais ça ne pourrait pas venir du président. Je ne pense même pas que ça pourrait venir du règlement de copropriété parce que quelqu’un pourrait dire : “votre règlement est contraire à la loi”. »

La langue de l’affichage

Si on publie une annonce pour louer un condo, la loi sur l’affichage s’applique, puisque c’est commercial. La publicité doit se faire en français. Elle peut aussi se faire en français et dans une autre langue, à condition que le texte rédigé en français ait un impact visuel plus grand que celui rédigé dans l’autre langue. « Mais si ce n’est pas à des fins commerciales ou publicitaires, comme une communication interne, ça peut être bilingue 50-50 », signale le professeur Guillaume Rousseau.

La langue du vivre-ensemble

Pour le reste, il n’y a pas beaucoup de choses précises sur les copropriétés.

« Au niveau théorique, ça semble bien, mais est-ce que dans les faits, les conditions sociales démographiques permettent vraiment l’exercice de ces droits-là ? soulève M. Rousseau. Est-ce que l’Office québécois de la langue française fait des choses au niveau de la copropriété ? À ma connaissance, ce n’est pas si évident. Le rôle de l’Office, c’est souvent les entreprises, la langue de travail. Est-ce qu’il y a suffisamment de travail de persuasion, de sensibilisation au niveau des copropriétés ? Je ne me souviens pas d’avoir vu un programme spécifique de l’Office de la langue visant à faire la promotion du français dans les assemblées de copropriétaires.

« Donc, au niveau de la loi, les droits sont là, mais le contexte ne rend pas ça toujours facile dans l’exercice à Montréal. Peut-être qu’il y aurait lieu d’avoir des programmes gouvernementaux de promotion de ces droits-là et de sensibilisation dans l’importance de les respecter. »

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  • 4 semaines plus tard...

Ce qu’il faut savoir avant d’acheter un condo

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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Être propriétaire dans une copropriété implique un partage avec d’autres propriétaires.

Généralement moins cher qu’une maison individuelle, un condo peut aussi s’avérer un placement immobilier intéressant. Cela dit, des vérifications s’imposent par rapport à la réglementation, ainsi qu’à la santé financière et structurelle de l’immeuble. Il faut en plus être prêt à vivre et à décider en collectivité.

Emmanuelle Mozayan-Verschaeve
Emmanuelle Mozayan-Verschaeve Collaboration spéciale

LA question essentielle

Selon Mikael Lacroix, courtier immobilier résidentiel et commercial pour le Groupe Sutton-Immobilier Estrie, affilié à Barnes International, l’aspect le plus important à prendre en considération avant d’acheter un condo existant est de savoir qu’être propriétaire dans une copropriété implique un partage avec d’autres propriétaires. « Quand on achète un condo, on est chez soi, mais pas chez soi. Si on en est conscient et à l’aise avec ça, on peut y trouver des avantages », remarque le courtier, en nommant les corvées d’entretien extérieures dont on n’a plus à s’occuper puisqu’elles sont prises en charge par une entreprise.

Un condo, trois parties

Une copropriété se divise en trois parties :

– la partie privative, qui est souvent l’unité intérieure personnelle ;

– les parties communes, comme le terrain à l’extérieur, le vestibule d’entrée que se partagent les copropriétaires ;

– les parties communes à usage restreint, telles que les balcons ou les places de stationnement. Chaque propriétaire profite seul de son espace, mais il doit se soumettre aux règlements de l’immeuble. Par exemple, il peut être interdit d’avoir un barbecue sur son balcon ou de laver son véhicule à sa place de stationnement.

Bien lire les règlements de l’immeuble

Il est essentiel de prendre connaissance de la déclaration de copropriété dans laquelle on va retrouver les règlements de l’immeuble avant de signer une offre d’achat. Certains pourraient ne pas vous convenir, comme le fait que les chiens ne sont pas acceptés, que la location à court terme est interdite, que les vélos doivent impérativement être rangés dans un local, etc.

Vérifier la santé financière de la copropriété

Autre aspect fondamental : vérifier la santé financière de la copropriété. « C’est souvent une condition dans la promesse d’achat et il y a toujours un endroit prévu pour que l’acheteur puisse prendre connaissance de tous les documents de la copropriété », souligne Mikael Lacroix.

Pensez aussi à demander les états financiers et les procès-verbaux, ce qu’il y a dans le fonds de prévoyance et s’il y a suffisamment d’argent prévu en cas de travaux majeurs à réaliser prochainement. « C’est important, car la copropriété aurait pu voter que chaque copropriétaire sorte 3000 $ de ses poches pour payer les rénovations sans prendre l’argent du fonds de prévoyance », dit Mikael Lacroix.

« En devenant nouveau copropriétaire, vous seriez obligé de payer ces 3000 $ puisque le vote est antérieur à votre arrivée », ajoute-t-il.

Pour avoir une idée claire sur l’immeuble, y compris ses états financiers et son administration, les courtiers immobiliers demandent à un représentant dûment autorisé du syndicat de copropriété de remplir un formulaire de demande de renseignements auprès du syndicat des copropriétaires (DRCOP) chaque fois qu’ils font une promesse d’achat. Cette démarche nécessaire pour protéger le nouvel acquéreur d’une copropriété a récemment été appuyée par le gouvernement du Québec, qui a voté deux nouvelles lois.

Deux nouvelles lois bienvenues

Le projet de loi 16 introduit par Québec modifie les règles en matière de copropriété dans le but de mieux protéger les consommateurs.

« Il y a deux articles importants qui sont une révolution légale en copropriété parce qu’ils ont été adoptés par l’Assemblée nationale et vont permettre aux acheteurs d’obtenir de l’information utile en amont de la transaction », souligne Yves Joli-Cœur, président du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec (RGCQ) et instigateur du site de vulgarisation sur la copropriété condolegal.com.

« L’article 1068,1, qui n’est pas encore en vigueur — il devrait l’être au cours de 2023 —, mentionne ce qui suit : Celui qui vend une fraction de copropriété (partie privative plus la quote-part des parties communes) doit en temps utile remettre au promettant acheteur une attestation du syndicat sur l’état de la copropriété dont la forme et le contenu sont déterminés par règlement du gouvernement. Ce texte signifie que chaque transaction immobilière en copropriété nécessitera au préalable une attestation de conformité. L’acheteur saura notamment si la copropriété est en difficulté, s’il y a des litiges afin que la transaction soit beaucoup plus transparente.

« Le deuxième article de loi 1068,2 est déjà en vigueur : Celui qui promet d’acheter une fraction peut demander au syndicat qu’il lui fournisse les documents ou renseignements concernant l’immeuble et le syndicat qui sont de nature à lui permettre de donner un consentement éclairé. Le syndicat est tenu, sous réserve des dispositions relatives à la protection de la vie privée de les fournir avec diligence au promettant acheteur aux frais de celui-ci. »

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PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

La question des assurances en cas de sinistre concernant une copropriété est à prendre très au sérieux.

Des responsabilités collectives

Les frais d’assurance s’ajoutent aux différentes charges de copropriété et la loi exige désormais d’avoir une assurance responsabilité civile pour une copropriété (1 million pour moins de 13 unités, 2 millions pour plus de 13 unités). « Il y a un autre volet rendu obligatoire : il s’agit du fonds d’auto assurance qui comprend le montant de la franchise en cas de sinistre de l’immeuble, mais il faut également faire évaluer l’immeuble par un évaluateur agréé pour vérifier les coûts de reconstruction de l’immeuble, parce que s’il dépasse la couverture de l’assurance, il faudra revoir celle-ci à la hausse pour s’assurer d’avoir les fonds nécessaires », précise Mikael Lacroix.

Inspection partielle ou globale

Avant d’acheter, vous pouvez choisir de faire inspecter uniquement votre partie privative, mais vous pouvez aussi mandater l’inspecteur de vérifier les parties communes intérieures et extérieures. L’inspection peut être l’occasion de savoir comment l’immeuble a été bâti, si les unités sont bien insonorisées. Sur ce point-là, vous pouvez également questionner le voisinage.

Investir… et s’investir

Vivre dans un condo nécessite une implication et une responsabilité collective et il faut être prêt à participer aux réunions du syndicat de copropriété pour prendre les décisions, voire à en devenir membre actif pour s’occuper du cahier des charges.

Pour Agnès D., l’expérience s’est révélée plutôt positive dans son ancien triplex, où chaque étage était occupé par un propriétaire. « Il peut y avoir des désaccords, alors il faut savoir manier l’art du compromis, mais globalement, ça se passait bien. »

Isabelle M., de son côté, n’est pas prête à réinvestir dans une copropriété. « Le côté positif, c’est que c’était accessible pour moi en tant que premier acheteur, mais il y a eu beaucoup de points négatifs. Il s’agissait d’un gros immeuble, les réunions n’en finissaient pas et il y avait souvent des désaccords. Aussi, on paie pour un fonds de prévoyance, mais même s’il y a des travaux d’entretien à faire, comme la peinture, ça peut prendre des mois, voire des années avant qu’ils soient réalisés. Et puis, les gens se surveillent les uns les autres, ça ne me convenait pas du tout, mais quand on m’a demandé de m’impliquer dans le fonctionnement de la copropriété, j’ai joué le jeu pour faire ma part, mais c’est très important de savoir qu’il s’agit d’une lourde responsabilité qu’on te met sur les épaules. »

 
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